FIL INFO – Lauréat du grand prix au concours i‑Lab 2018, le projet grenoblois de startup Moïz compte commercialiser en 2019 des capteurs connectés tout à fait révolutionnaires. Résultat de dix ans de recherches menées à l’Institut grenoblois Louis Néel et d’un transfert de technologie réussi soutenu par la Satt Linksium, ses détecteurs destinés à l’industrie seront alimentés par une source d’énergie autonome, sans fil ni pile.
Selon des estimations, à l’horizon 2020, quelque 50 milliards d’objets connectés seront utilisés sur Terre. Dès lors, se pose la question cruciale de leur alimentation en électricité. Si libérer ces objets des piles, des batteries et des fils électriques va certes dans le sens de l’histoire, cet objectif semble a priori relever de l’utopie.
Pas du tout, selon les fondateurs de la future startup “deeptech” grenobloise Moïz qui sera officiellement créée en 2019.
Olivier Bourgeois et Dimitri Taïnoff, tous deux chercheurs grenoblois à l’Institut Néel, annoncent qu’ils vont commercialiser dès l’année prochaine des capteurs connectés pour l’industrie, alimentés par une source d’énergie autonome, sans fil ni pile.
La startup Moïz espère voir le silicium se transformer en or
Cette source d’énergie ? Un générateur Mems [Micro-Electro-Mechanical-Systems, ndlr] en silicium qui parvient à convertir la simple chaleur en électricité. Point de magie noire là-derrière ! La faisabilité du concept a même déjà été prouvée par des expériences en laboratoire.
Leur démonstration s’est avérée si convaincante qu’en juillet dernier, au concours national d’aide à la création d’entreprises de technologies innovantes i‑Lab, nos deux chercheurs ont décroché l’un des quatorze grands prix.
À la clé ? Tout d’abord, une aide financière substantielle à la création d’entreprise. De surcroît, à l’occasion des vingt ans du concours, vient s’y ajouter cette année le précieux parrainage d’un industriel.
Sigfox, un parrain de renom
Ludovic Le Moan, directeur général de Sigfox, opérateur télécom de l’internet des objets et président 2018 du jury du concours, flairant le bon filon, s’est proposé de parrainer la start-up. Son souhait ? « Aider Moïz à trouver des clients qui paient et vite !! », lance-t-il à la manière d’un slogan.
Une chose est sûre, les deux apprentis entrepreneurs n’ont pas attendu ce soutien pour commencer à s’attaquer au marché. En 2017, des études de faisabilité ont même déjà été signées avec la SNCF et Air Liquide, conduisant à la réalisation de démonstrateurs.
Au terme d’une genèse qui est loin d’avoir été un long fleuve tranquille [voir encadré], les voilà désormais prêts pour franchir le Rubicon de la création d’entreprise en 2019 et révolutionner, espèrent-ils, le vieux monde des objets connectés dépendant des piles, batteries ou fils électriques.
VM
DU PROJET « MODULO » À LA FUTURE START-UP « MOÏZ »
Plus de dix ans de développement au CNRS
Petit tour dans la machine à remonter le temps. La technologie de pointe transférée dans les mains de Moïz a nécessité en amont plus de dix ans de développement au sein de l’Institut Néel, dans l’équipe conduite par Olivier Bourgeois.
Fin 2015, avec Dimitri Taïnoff, ce dernier amorce le transfert technologique et fournit la première preuve de concept en laboratoire, à l’issue d’un an d’une phase de prématuration organisée par le CNRS. Une étape couronnée par un premier dépôt de brevet.
Un transfert technologique accéléré par le concours Challenge out of labs
En avril 2016, fort du soutien du service partenariat et valorisation du CNRS Alpes, les deux chercheurs sont lauréats du concours Challenge out of labs organisé par la Société d’accélération du transfert de technologies (SATT) Linksium. Et bénéficient alors de l’accompagnement d’un chargé d’affaire Linksium dans la perspective de l’entrée en maturation.
Le résultat ne se fait pas attendre. Dès janvier 2017, leur projet initialement nommé « Modulo » convainc de son potentiel le comité d’investissement de Linksium. Qui ne tarde pas à ouvrir les vannes pour financer des développements technologiques et des actions de promotion (salons spécialisés, interviews d’industriels…).
Ce, dans le but d’identifier les cas d’usage pertinents et, partant, cibler de futurs clients. C’est là qu’ils signent avec la SNCF et Air Liquide tout en consolidant, prudence oblige, la propriété intellectuelle par le dépôt de deux brevets supplémentaires.
Un projet soutenu jusqu’à son terme par Linksium
Fin 2017, grâce au réseau et à la plateforme Share K, dédiée à la recherche d’associés pour des projets technologiques, les deux chercheurs s’associent avec l’entrepreneur Thierry Garret.
Ce dernier est séduit par le potentiel innovant du produit et les perspectives offertes par le marché. Alors que le projet est entré en phase d’incubation pour une durée de quinze mois, Thierry Garret lance les actions commerciales et la constitution de la future entreprise Moïz. Aidé encore en cela par la Satt Linksium.