FOCUS – La première pierre du bâtiment Open innovation center du CEA a été posée ce mardi 25 septembre lors d’une cérémonie en présence des différents partenaires du projet. Situé sur le campus Giant de la presqu’île scientifique de Grenoble, ce lieu est dédié à l’innovation collaborative pour prendre part aux transformations radicales du monde contemporain et répondre aux enjeux sociétaux de demain. Livraison prévue pour l’été 2019.
« L’Open innovation center, dans notre esprit, doit devenir la locomotive du CEA pour transférer l’innovation technologique aux entreprises », se prenait à espérer Stéphane Siebert, directeur de la recherche technologique du CEA (CEA-tech), ce mardi 25 septembre. C’est ainsi que ce dernier a introduit les discours officiels lors de la pose de la première pierre de l’Open innovation center (OIC) du Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives (CEA), place Nelson Mandela sur le campus Giant* de la presqu’île scientifique grenobloise.
Devant lui, un parterre de personnalités de la recherche, du secteur industriel et de l’entreprenariat, ainsi que les principaux partenaires financiers du projet dont le Département, la Région et l’État.
« Une fenêtre pour la technologie et la science »
Inconcevable en effet pour la direction de la recherche technologique que le CEA, « identifié comme l’organisme de recherche public le plus innovant en Europe et deuxième au niveau mondial », ne puisse monter au pinacle. Avec l’OIC, en sus d’un site de transfert technologique le plus efficace possible, le CEA a voulu se doter d’un lieu vitrine emblématique : « une fenêtre pour la technologie et la science ». À la fois pour le campus Giant et pour ses partenaires**.
Ce, « à l’image des grands campus d’innovation de rang mondial (MIT aux USA, Itri à Taïwan, Kaist en Corée, Fraunhofer en Allemagne, Imec aux Pays-Bas, etc.) qui disposent, eux aussi, d’un tel lieu incarnant la démarche d’innovation portée par l’entité », poursuit le directeur.
Dix sept millions d’investissement initial
Que l’OIC soit un lieu de rayonnement pour le CEA et ses partenaires est certes utile mais les élus, bien campés dans leur rôle, privilégient dans leurs discours les retombées qu’ils en attendent tant sociétales qu’économiques.
« À travers le projet d’Open innovation center, le Département marque son soutien à une innovation au service des territoires. Mobilités, santé connectée, vieillissement à domicile… Nombreux sont les défis qui se présentent à nous et qui nécessitent des réponses innovantes », a en effet commenté Jean-Pierre Barbier, président du Département de l’Isère qui a soutenu ce projet à hauteur de 4 millions d’euros. Une part non négligeable dans un investissement initial de 17 millions d’euros.
Une coquette somme injectée dans un contexte estimé très favorable à l’émergence de cette nouvelle structure. De fait, « les transformations radicales du monde contemporain ouvrent depuis plusieurs années un nouvel âge d’or à l’innovation technologique », constate le CEA.
Dans son sillage, Yannick Neuder, vice-président de la région Auvergne-Rhône-Alpes souligne les conséquences positives que peuvent en attendre les territoires. « La Région Auvergne-Rhône-Alpes est fière de renouveler son soutien au CEA, acteur clef du domaine d’excellence régionale de l’industrie du futur et de la production industrielle, dont les retombées participent plus largement au développement territorial avec la création d’emplois qualifiés et l’obtention d’un gain de compétitivité technologique sur le plan international », complète l’élu régional, justifiant ainsi les 6 millions d’euros mis sur la table par la Région.
Un lieu totem adapté au nouveau modèle d’innovation
L’innovation technologique change actuellement de nature et les équipes projet doivent pouvoir s’y adapter pour rester compétitive. De fait, « [au] modèle reposant sur les technologies au service de la performance et de la baisse des coûts, s’ajoute aujourd’hui la nécessaire prise en compte du changement », explique le CEA. En intégrant dans ce nouveau lieu « totem » le moteur du changement à la représentation actuelle de l’innovation, le centre de recherche espère offrir aux équipes projet les meilleures conditions de travail pour leur permettre de se hisser au plus haut niveau dans la course mondiale à l’innovation.
Ainsi, afin de mieux anticiper l’identification des nouveaux usages et modèles économiques, le CEA mise sur le partage des visions du futur. Et pour ce faire, il a voulu que ce lieu facilite la rencontre entre les technologies développées par les chercheurs au sein des laboratoires de recherche du centre et les besoins de ses partenaires entrepreneurs et industriels.
Et pour accélérer le changement par le développement toujours plus rapide de « projets de rupture », le CEA compte sur les collaborations multi-partenaires et sur le rassemblement à l’OIC d’une communauté d’industriels et de chercheurs. Mais aussi, à terme, de créateurs d’entreprise, d’étudiants, de designers, d’artistes, d’investisseurs et d’aménageurs.
Le fonctionnalisme au cœur de l’architecture
Parce que l’innovation technologique doit être la plus collaborative et efficace possible au sein de l’OIC, le premier bâtiment d’une surface de 3 300 m2 – par ailleurs sécurisé pour travailler en confidentialité – sera composé de plateaux projets reconfigurables, d’ateliers de prototypage rapide et d’un showroom des innovations à l’étage.
Le tout, à proximité des compétences et savoir-faire des 6 000 collaborateurs travaillant sur le site du CEA de Grenoble. Date de livraison prévue ? Courant de l’été 2019.
Viendra compléter cette construction d’ici 2020, un deuxième bâtiment vitrine de près de 10 000 m2 – cette fois-ci entièrement ouvert au public – surnommé pour se distinguer du précédent l’OIC partenaires. À cela s’ajoutera encore un espace extérieur composé d’un parvis, d’une agora de 200 places et d’un lieu événementiel extérieur.
Cette organisation spatiale a été pensée en amont dans les moindres détails par le CEA, en collaboration avec l’agence d’architecture Chabanne + Partenaires afin de créer une symbiose entre architecture et innovation collaborative. Une co-construction qui s’est vue optimisée par l’utilisation de la maquette numérique. Tant et si bien que cette méthode appliquée pour l’OIC a été récompensée par la presse spécialisée le 17 septembre dernier d’un deuxième prix aux Bim** d’Or 2018 dans la catégorie « projets inférieurs à 5 000 m² ».
Des résidences partenariales pour une durée moyenne de dix-huit mois
Le centre de recherche destine plus spécifiquement l’OIC aux entreprises, industriels et PME, d’un même domaine souhaitant réaliser ensemble un produit technologique sur leur segment de marché. Notamment dans les champs de l’énergie, du numérique et de la santé. Au nombre de quinze au maximum en parallèle, « les résidences partenariales accueilleront pour une durée moyenne de dix-huit mois des équipes projets multidisciplinaires », annonce le CEA.
Concrètement, pour les accompagner, ces équipes pourront compter sur l’engagement à leurs côtés des experts CEA en technologies, en marketing et en usages. Mais également, de collaborateurs de l’entreprise partenaire et d’une équipe support : architecte système, marketing de l’innovation, design industriel et prototypage.
« [Elles] bénéficieront plus globalement d’un accompagnement dans le processus d’innovation collaborative afin de lever des verrous technologiques, [d”]intégrer de nouvelles fonctionnalités dans les produits ou [d”]exploiter les ruptures technologiques d’un secteur », précise le CEA.
Autant de services payants dont le montant sera négocié au cas par cas avec les entrepreneurs intéressés par cet environnement collaboratif qui se veut propice à l’innovation technologique.
Des entreprises déjà en lice pour accélérer l’innovation
Le CEA n’en fait guère mystère, trois projets vont d’ores et déjà se poursuivre au sein de l’OIC. L’un avec STMicroelectronics qui prend le virage de l’intelligence artificielle à travers la série de ses microcontrôleurs STM32. Il en fabrique déjà un milliard d’unités par an et s’appuie sur les compétences du CEA dans ce domaine.
Le deuxième ? « Une résidence sur l’impression 3D industrielle est d’ores et déjà imaginée pour lancer les hubs [point de connexion central, ndlr] d’innovations thématiques animés par un écosystème d’acteurs concernés », annonce le CEA, dans le prolongement naturel de son partenariat stratégique entre Hewlett Packard (HP) sur l’impression 3D pour la fabrication additive.
Quant à l’interrupteur autonome mis au point par l’usine Legrand de Saint-Marcellin en collaboration avec le CEA, il sera produit sur place.
Véronique Magnin
* Giant : entendez, « Grenoble Innovation for Advanced New Technologies »
** L’université Grenoble-Alpes (UGA), l’Institut national polytechnique de Grenoble (INP Grenoble), les grands instruments européens dont l’ESRF et l’ILL, le CNRS et Grenoble École de management (Gem).
**Le Bim ou Modèle d’information du bâtiment est une nouvelle façon d’aborder le monde de la construction en utilisant une maquette numérique et de nombreuses données, enrichies par l’ensemble des parties prenantes du projet. Cette méthodologie assure une meilleure maîtrise des étapes de la conception à la construction d’un bâtiment. « Pour l’Open innovation center du CEA, ce processus de travail collaboratif viendra également soutenir les services qui accompagneront le projet tout au long de son cycle de vie (construction, maintenance, intelligence économique, sécurité, etc.) », précise le CEA, emballé par ce nouveau modèle de construction.