FOCUS – Humeur au beau fixe pour l’équipe de L’Hexagone, scène nationale arts sciences basée à Meylan. La salle passe sous le giron de la métropole grenobloise et renforce ainsi son action sur le territoire. Et, côté programmation 2017 – 2018, elle nous réserve quelques jolies surprises. Sélection.
Côté paysage culturel, économie oblige, la grise mine se généralise. À l’Hexagone pourtant, on affiche une bonne humeur quasi insolente. Il faut dire que l’obtention du label « scène nationale arts sciences » en 2014 fait de l’équipement basé à Meylan une entité unique en son genre sur le territoire français.
Et surtout, depuis janvier 2017, la salle dépend désormais de la métropole de Grenoble, cette dernière s’étant dotée de la compétence culturelle. Conséquence heureuse, de nouvelles subventions de la part de l’État sont tombées en échange d’une politique d’action culturelle accrue sur le territoire.
Antoine Conjard, aux manettes de la salle depuis 2001, se félicite également de voir les recherches mêlant le scientifique, la technique et l’artistique devenir un véritable secteur d’activité sur l’ensemble du pays. Un credo de l’Hexagone, précurseure dans le domaine, et de l’Atelier Arts Sciences, laboratoire commun entre artistes et scientifiques mené avec le CEA Grenoble.
Autre cause de satisfaction, la salle de Meylan pourra même se permettre de changer ses fauteuils. Ouf de soulagement pour le public – à l’assise exigeante ! – présent lors de la présentation de saison 2017 – 2018. De notre côté, on se réjouit surtout de découvrir parmi la nouvelle programmation quelques pépites, dont voici une courte sélection.
Des pointures de la piste
Les férus de cirque contemporain n’ont pas toujours de quoi se satisfaire dans les salles de l’agglomération grenobloise. L’Hexagone de Meylan répond à cette frustration en programmant deux grands noms. A commencer par l’incontournable et inclassable Johann Le Guillerm qui cherche depuis une quinzaine d’années la manière d’élaborer lui-même son monde « pour ne pas le subir mais mieux l’éprouver, le penser, le vivre ».
Spécialiste de l’interaction et de l’équilibre avec les objets, il demeure habituellement sans mot, laissant ses performances atypiques parler pour lui. Dans Le pas grand-chose (les 10 et 11 octobre) – au titre très vendeur ! –, ce taiseux explique sa démarche, à grand renfort d’objets de toutes sortes qui viennent illustrer son étrange discours.
Issu de la nouvelle génération, Yann Frisch est la coqueluche des arts du clown et l’un des représentants les plus enthousiasmants de ce que l’on appelle désormais la “magie nouvelle”. Soit une magie mise au service d’une véritable histoire, sans pour autant céder de terrain côté technique.
Ici, le personnage qu’il incarne dans Le Syndrome de Cassandre (du 17 au 19 octobre) prophétise sans jamais être cru, comme le personnage mythologique du titre.
À ceci près que, pour sa part, c’est son statut de clown qui le décrédibilise aux yeux de son auditoire. Ne vous y trompez pas, magie et clown ne sont pas ici synonymes de proposition jeune public puisque le spectacle est déconseillé aux moins de 14 ans !
Technologies et narration
En adéquation avec l’identité de la salle, on trouve prometteur l’argument de la pièce #softlove, mise en scène par Frédéric Deslias. Adapté du texte d’Éric Sadin, le spectacle se penche sur la relation qu’une jeune femme entretient avec son assistant numérique, qui sait absolument tout d’elle. Entre histoire d’amour et risque de dépendance, le récit rappelle le film Her, sorti en 2013, au sein duquel un personnage de dépressif chronique interprété par Joachin Phoenix s’éprend de son nouvel assistant d’exploitation doté, il faut dire, de la voix de Scarlett Johansson.
L’Hexagone, loin de donner dans l’apologie à tout crin de tout ce qui ressemble de près ou de loin à un progrès technique, n’hésite pas, via sa programmation et son action culturelle, à interroger notre manière – excessive ? – de déléguer toutes sortes de tâches à nos ordinateurs. On s’en réjouit.
Adèle Duminy
Experimenta, la biennale Arts Sciences
Changement de nom et de dates pour le rendez-vous biennal organisé par l’Hexagone et l’Atelier Arts Sciences. Les Rencontres‑i (comme imaginaire) deviennent Experimenta, la biennale Arts Sciences.
Et on passe de l’automne à l’hiver. La 9e édition de la biennale aura lieu du 1er au 10 février 2018. Hormis le salon Experimenta consacré à la présentation de multiples dispositifs mêlant art, science et technologie qui se déroule à Minatec et à l’INPG, les spectacles sont programmés dans onze salles partenaires de l’agglomération.
Au Magasin des horizons, le 1er février, on pourra voir l’intriguant Forecasting. Giuseppe Chico et Babara Matijević y croisent les modes narratifs. Entre documentaire et fiction, ils puisent leurs images dans une banque de films amateurs disponibles sur le net.
Le reste de la programmation ménage ainsi de prometteuses découvertes. À suivre.
Infos pratiques
Toute la programmation sur le site de L’Hexagone, scène nationale arts sciences