La ligne Lyon-Turin est-elle sur une voie de garage ? D'avancées en reculades, le projet n'en finit pas de ne pas voir le bout du tunnel...

Ligne fer­ro­viaire Lyon-Turin : il est encore loin le bout du tunnel ?

Ligne fer­ro­viaire Lyon-Turin : il est encore loin le bout du tunnel ?

DÉCRYPTAGE - Où va le Lyon-Turin ? Vingt ans après les premières études, la ligne ferroviaire pourrait bien finir sur une voie de garage. Le gouvernement a mis le projet sur pause et se donne encore quelques mois, le temps de se pencher sur la question du financement des 26 milliards d'euros de l'ouvrage. Épine dorsale du projet, le tunnel franco-italien, lui, avance cahin-caha, non sans soulever des questions. A qui profite le Lyon-Turin ?

 

 

Vingt ans… Et le Lyon-Turin, cette ligne ferroviaire de deux cents kilomètres, chaînon central d’un couloir entre Lisbonne et Kiev, n'a toujours pas vu le bout du tunnel. Ses plus fervents défenseurs y avaient pourtant cru quand, le 22 décembre 2016, l’Assemblée nationale avait voté sans débat la ratification du traité franco-italien. Puis quand, le 25 janvier 2017, le parlement avait donné son feu vert. En juin dernier, à Lyon, les premiers appels d’offre étaient même présentés à un parterre de chefs d’entreprise avec, à la clé, une manne de 5,5 milliards d’euros pour les entreprises qui décrocheraient les marchés.

 

La ligne ferroviaire transalpine Lyon-Turin : pour ses promoteurs, un maillon central du corridor méditerranéen. Stratégique et loin des débats franco-français...

La ligne ferroviaire transalpine Lyon-Turin : pour ses promoteurs, un maillon central du corridor méditerranéen, stratégique et loin des débats franco-français... © document La Transalpine

 

Et puis, Élisabeth Borne a, en ce mois de juillet 2017, momentanément sifflé la fin de la récré. Au vu de l’état des infrastructures existantes mais aussi des finances publiques, la ministre déléguée aux transports* a mis le Lyon-Turin sur « pause ». Car le projet prévoit le percement de plusieurs tunnels sous les Alpes. Quatre-vingt kilomètres en tout, dont un, le tunnel de base, long de 57 kilomètres entre Saint-Jean-de-Maurienne en France et Val de Suze en Italie. Un tunnel transfrontalier qui viendrait doubler la ligne existante, celle du Mont-Cenis jugée obsolète.

 

Objectif officiel : réduire les temps de parcours mais aussi mettre un million de camions sur les trains. Mais, vingt ans après, les caisses de l'État se sont vidées et, pour le gouvernement, il est urgent de redéfinir les priorités.

 

 

Le Lyon-Turin débattu au parlement en 2018

 

 

« Les engagements de l’État pour de nouvelles infrastructures (de transport, ndlr) dépassent les 18 milliards d’euros sur les cinq prochaines années», a précisé la ministre le 20 juillet dernier lors de son audition au Sénat. « Sur la période, nous avons 11 milliards de ressources identifiées. Par ailleurs, il manque trois milliards pour entretenir et rénover les réseaux routiers et fluviaux ainsi que nos grands ponts […]. L’impasse est aujourd’hui de 10 milliards sur le quinquennat. »

 

Pour le gouvernement, il est urgent d’attendre (encore) un peu. Des assises de la mobilité seront lancées à la rentrée, coup d’envoi d’une grande loi d’orientation qui sera présentée au parlement pour y être débattue au premier semestre 2018.

 

Alors que, de l’autre côté des Alpes, l’Italie a décidé d’économiser 2,6 milliards d’euros en renonçant à un tunnel et en en réduisant un autre mais sans toucher à la section transfrontalière, la France va-t-elle à son tour lever le pied ?

 

Elisabeth Borne, ministre déléguée aux transports lors de son audition au Sénat le 20 juillet 2017 (capture d'écran).

Élisabeth Borne, ministre déléguée aux Transports, lors de son audition au Sénat le 20 juillet 2017 (capture d'écran).

« Il faut d’abord améliorer l’existant avant de réclamer des milliards pour créer une nouvelle ligne à côté », pointait la ministre, sans nommer précisément les projets qui pourraient être retoqués. Difficile de ne pas y voir l’ombre du Lyon-Turin.

 

Voilà des années que les écologistes – les seuls à véritablement ferrailler dans l’arène politique contre la ligne – dénoncent un « grand projet inutile » et réclament que « l’existant », la ligne du Mont-Cenis, utilisée au cinquième de ses capacités, monte en régime. D'une capacité de 16-17 millions de tonnes par an, l'actuelle ligne n'en voit passer que 2 ou 3 millions.

 

 

« En France, on a organisé un report modal à l'envers… » juge Pierre Mériaux

 

 

« En 1983, cent vingt trains de fret transitaient chaque jour. Aujourd'hui, il n'y en a que vingt ! fait remarquer Pierre Mériaux, ex-conseiller régional EELV et conseiller municipal délégué au tourisme et à la montagne à la ville de Grenoble. Où sont-ils passés ? Sur la route. En France, on a organisé un report modal à l'envers… »

 

La ligne du Mont-Cenis, mise en service en 1871, a pourtant été mise à niveau pour plus de 100 millions d’euros. N’est-elle donc pas suffisante pour faire circuler davantage de trains de voyageurs et de marchandises au point qu’il faille construire un nouveau tunnel entre la France et l’Italie d’un coût pour l’heure estimé à 8,6 milliards d’euros ?

 

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Patricia Cerinsek

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