FOCUS – Parier sur le retour aux urnes des abstentionnistes ou le report de votes paraît très hasardeux sur la première circonscription de l’Isère, où l’ex-député et médecin Olivier Véran, porté par la vague Macron, a pris le large. Sans véritable réserve de voix à droite, il paraît très difficile pour l’avocat et maire de Corenc, Jean-Damien Mermillod-Blondin de s’agripper à une potentielle bouée de sauvetage.
Le premier, arrivé largement en tête du premier tour des législatives avec plus de 47 % des voix, porté par la vague Macron, le voit comme un plébiscite. Le second, relégué à près de vingt points derrière, s’en dit le « rescapé ». Sur la première circonscription de l’Isère, c’est peu dire que l’écart entre le candidat arrivé en tête, l’ex-socialiste devenu macroniste Olivier Véran, et le candidat du centre droit Jean-Damien Mermillod-Blondin (LR-UDI), ressemble à un fossé. Un fossé pour ainsi dire infranchissable tant l’ex-député a rallié sur non nom, et surtout sur celui de La République en marche, une très large majorité des suffrages.
Sur une circonscription déjà acquise à la cause des marcheurs lors de la présidentielle – Emmanuel Macron y avait fait parmi ses meilleurs scores en France –, parier sur le retour aux urnes des abstentionnistes ne devrait guère permettre d’inverser la tendance. D’autant que l’électeur devrait se retrouver face à lui-même.
Pas de consignes de vote du côté de La France insoumise qui, avec une place de troisième et le score de 10 %, peut se targuer d’une certaine réserve de voix. Ni d’EELV (9 %) qui, dans un communiqué, précise ne pas faire « de distinction entre deux nuances de droite ». Le candidat qu’elle soutenait, au sein de mouvement Ensemble pour gagner ne dit pas autre chose. « Pour moi, c’est blanc-bonnet et bonnet-blanc », résume Nicolas Kada.
Pas de mot d’ordre non plus du côté du candidat de Génération écologie, Eric Grasset, soutenu par le PS, le PCF et le PRG (3,93 %). Qui, s’il dit apprécier Olivier Véran, se dit aussi très inquiet quant au programme « qui s’affirme de plus en plus antisocial et sans dialogue » porté par En marche _ « le parti aux mêmes initiales que le président Emmanuel Macron« _ et refuse d’infantiliser l’électeur en lui dictant pour qui voter…
LREM et LR : deux nuances de droite pour EELV
Balle au centre donc. Poussé par le vent présidentiel, l’ex-ministrable se sent pousser des ailes. Il n’est pas le seul. Sur l’Isère, les dix candidats marcheurs se sont tous sans exception qualifiés pour le second tour des législatives. L’élan va-t-il se poursuivre ? Ou l’électeur va-t-il être tenté, pour ce 2e tour, d’enrayer cette marche en avant ?
« L’intérêt de l’électeur n’est-il pas d’avoir un député qui n’est pas une machine à voter ? », nous avait répondu Jean-Damien Mermillod-Blondin au soir du premier tour, en référence au contrat moral signé par les candidats marcheurs. « D’avoir un député qui puisse apporter une voix différente pour que tout ne se règle pas dans la rue mais puisse se régler de manière démocratique dans une enceinte qu’est l’Assemblée nationale ? »
Le neurologue, souvent taxé d’opportunisme pour avoir déserté les rangs socialistes avant la débâcle, se défend de l’accusation de « député godillot ». « Je l’ai prouvé quand j’ai été député durant trois ans pour remplacer Geneviève Fioraso, devenue ministre », souligne-t-il.
Le suppléant de la députée sortante Geneviève Fioraso – toujours socialiste mais qui ne cache pas un très net penchant pour Emmanuel Macron – a, pour lui, une certaine connaissance de la circonscription. Sans compter une maîtrise des dossiers liés à la santé. Député, il a porté le projet de loi de financement de la sécurité sociale et s’est attelé au dossier de la modernisation du système de santé. Il est aussi à l’origine d’amendements, comme celui pour lutter contre l’anorexie des mannequins.
Olivier Véran, futur député… et conseiller régional ?
Un certain bagage mais pas vraiment le profil du candidat du renouvellement, ni celui de la société civile. D’autant qu’Olivier Véran est aussi conseiller régional d’opposition. Le restera-t-il ? Pour l‘heure, le candidat élude la question. Interrogé à ce sujet sur les antennes de France bleu Isère par Jean-Damien Mermillod-Blondin, qui lui reproche de vouloir cumuler mandats et indemnités, le candidat marcheur a renvoyé à l’après deuxième tour sa décision. Reste que, ne siégeant pas dans l’exécutif, rien dans la loi ne l’empêche de garder son strapontin dans l’hémicycle régional. Et donc de cumuler.
Interrogé par Place Gre’net quelques jours avant le premier tour, le neurologue s’était toutefois engagé à être un député à cent pour cent. Et à se mettre en disponibilité de l’hôpital de Grenoble où il travaille en tant que neurologue.
Jean-Damien Mermillod-Blondin s’est, lui, engagé à démissionner de son mandat de maire pour ne garder que celui de conseiller municipal. L’avocat conserverait toutefois sa place de président de groupe d’opposition à la Métro.
Patricia Cerinsek