REPORTAGE VIDÉO – La fête s’est emparée des rues de Grenoble, ce samedi 3 juin. Près de 1 300 personnes ont participé à la 4e édition de la Marche des fiertés lesbienne, gaie, bisexuelle, transsexuelle, transgenre et intersexuée (LGBTI). Une marche festive mais aussi revendicative pour alerter sur le quotidien des personnes LGBTI, les propos homophobes, l’oppression dans certains pays…
Colorée, joyeuse, festive et digne. Tels sont les qualificatifs qui viennent instantanément à l’esprit pour décrire l’ambiance qui a régné, ce samedi 3 juin, lors de la Marche des fiertés. Un événement organisé par le Centre LGBTI de Grenoble – Cigale en point d’orgue de la Semaine des fiertés.
Sous les frondaisons du Jardin de ville, les rainbow flags – drapeaux arc-en-ciel emblématiques du mouvement LGBTI – omniprésents donnaient le ton de la manifestation. Dans la petite foule, certains étaient venus déguisés – affichant parfois une outrance volontaire et assumée –, d’autres seulement maquillés ou ceints d’une écharpe arc-en-ciel. Des élus étaient là aussi dont Emmanuel Carroz, conseiller municipal délégué à l’égalité des droits et à la vie associative, ainsi que certains candidats aux élections législatives.
Une chose est sûre, l’envie de s’amuser et de faire la fête était dans tous les esprits. Que l’on appartienne à la communauté ou que l’on soit hétérosexuel importait peu, l’essentiel était d’être ensemble. Une manière d’exorciser et de dénoncer, dans une forme proche de la catharsis, la gravité des actes d’homophobie en recrudescence un peu partout dans le monde. Comme les crimes contre les homosexuels en Tchétchénie, ou en Iran et au Nigeria où des femmes et des hommes sont arrêtés, torturés, séquestrés et parfois exécutés pour leur orientation sexuelle.
« Certaines personnes victimes d’homophobie préfèrent se taire »
Cette année pour cette marche des fiertés, un mot d’ordre en forme de cri : « Respect, égalité, tolérance : urgence ! » Et urgence il y a si l’on considère la recrudescence d’actes homophobes, lesbophobes, biphobes, transphobes et sexistes perpétrés chaque jour un peu partout. C’est du moins le sens de l’alerte que lance Sophie Vilfroy, déléguée régionale de SOS Homophobie.
« Il y a eu 1 575 actes d’homophobie d’après notre rapport annuel 2016. Ce chiffre, nous pouvons le multiplier par deux ou par trois parce que, malheureusement, des personnes ne trouvent pas le courage d’appeler et préfèrent se taire dans l’indifférence », s’inquiète la déléguée régionale.
C’est en revanche musique techno à fond qu’environ 1 300 personnes ont joyeusement déambulé dans les rues de Grenoble pour affirmer et crier haut et fort « les droits de chaque personne à pouvoir être ce qu’elle est dans un monde qui continue d’exclure des personnes pour leurs différences ».
Retour en vidéo sur une manifestation pleine de vie, à des années lumière des traditionnels cortèges revendicatifs syndicaux…
Reportage Joël Kermabon
Le changement d’état civil pour les personnes trans : des situations ubuesques
Parmi les revendications mises en avant lors de ce rassemblement, le droit à la procréation médicalement assistée (PMA) pour toutes les femmes, le don du sang pour les homosexuels et les bisexuels, la liberté de changement d’état civil pour les personnes transsexuelles…
La ville de Grenoble, outre son implication dans la Semaine des fiertés, est très active sur le front LGBTI. Notamment via le soutien à l’association Rita qui aide les personnes trans à changer d’état civil, en lien avec le Planning familial. « Un parcours compliqué qui doit être amélioré juridiquement car, si elles peuvent effectivement changer de prénom, elles ne peuvent pas changer d’état civil entre Monsieur et Madame. On en arrive à des situations ubuesques du type Madame Jean-Pierre ou Monsieur Annick », explique Emmanuel Carroz.
Qui précise au passage que l’association Rita aidera également la municipalité à avoir de bonnes pratiques, notamment en ne précisant pas les termes Monsieur ou Madame dans les formulaires où il n’y en a pas besoin et en formant les personnels municipaux.
Également dans les tuyaux, un appel à partenariat avec les partenaires institutionnels et les associations pour les droits des personnes LGBTI. « J’ai notamment interpellé l’Éducation nationale la semaine dernière dans le Dauphiné libéré pour signaler que, si les collèges et les lycées ont des demandes ou des actions à faire concernant les jeunes, ils peuvent compter sur l’aide de la Ville de Grenoble », rapporte Emmanuel Carroz.
L’élu en profite par ailleurs pour rappeler les actions perlées de la Ville avec le festival Vues d’en face et l’association Le Refuge. Et se félicite que les jeunes personnes LGBT puissent désormais disposer d’un lieu d’accueil. « La ville de Grenoble avait accordé [à l’association, ndlr] une subvention de 15 000 euros et, là, ils ont pu obtenir un lieu d’accueil grâce aux bailleurs sociaux de la ville », nous confie-t-il.
« Ce qu’a fait Gabriac c’est de l’homophobie ! »
Quant à l’action menée par les militants de l’ultra-droite de Civitas, Emmanuel Carroz ne mâche pas ses mots. « Ce qu’a fait Gabriac aujourd’hui, c’est clairement de l’homophobie. Une marche festive qui se voit bloquée par l’ultra-droite, des personnes qui, de plus, ne se cachent pas de faire le salut nazi, c’est très agressif ! », fustige l’élu.
Ce dernier assure que tout a été fait pour que « les gens qui défilaient dans la joie et la fraternité ne voient pas ce qui se passait et puissent poursuivre leur marche militante pour l’égalité des droits ». Pas de quoi décourager les organisateurs qui pensent déjà à la prochaine marche des fierté autour du 17 mai 2018, à l’occasion de la journée mondiale de lutte contre les LBGTphobies.
Joël Kermabon