FOCUS – Les portes ouvertes européennes de l’Habitat participatif se déroulent tout au long de ce mois de mai. L’occasion de découvrir des modes de résidence où collectivité rime avec convivialité. Exemple à Grenoble avec Au clair du quartier, un projet, porté par cinq familles, récompensé par un prix de l’Habitat durable. Misanthropes s’abstenir !
Plus qu’un logement, un « projet de vie ». Cela fait une dizaine d’années que Bénédicte rêvait de pouvoir emménager dans un “immeuble” comme Au clair du quartier, situé à proximité du lycée des Eaux claires. Bénédicte est par ailleurs cofondatrice et salariée de l’association Les Habiles, qui œuvre à la promotion de l’habitat participatif en Isère.
En 2011, en lien avec un autre couple, Bénédicte et son mari répondent à un appel à projets lancé par la municipalité. « Nous étions deux foyers à l’initiative, et nous avons utilisé le réseau des Habiles pour diffuser une petite annonce en présentant notre projet. On a proposé des réunions et des gens sont venus, le groupe s’est constitué de manière très spontanée, et très fluide », explique-t-elle.
En 2012, le projet présenté par le collectif est retenu, mais le parcours du combattant ne fait que commencer. Démarches, réunions, constitution d’une société civile immobilière (SCI)… Bénédicte ne cache pas que des tensions ont fini par apparaître dans le groupe, épuisé. Le début des travaux aura été un soulagement pour tout le monde. Enfin, au bout de cinq ans, chacun a pu intégrer son nouveau chez-soi. Ou… chez tout le monde ?
Salle collective et buanderie partagée
Outre une structure architecturale originale, le mode de fonctionnement de l’immeuble est bien différent des logements conventionnels. Bien sûr, chaque foyer dispose d’appartements privatifs, qui se répartissent sur trois étages. Avec, comme toujours, une vue sur les toits et les montagnes pour les plus en hauteur. Les ménages situées au premier disposent d’un balcon, pour compenser la vue sur une cour encore un peu nue.
Mais l’immeuble propose également un “appartement d’amis” destiné à accueillir des visiteurs, jouxtant une spacieuse terrasse. Ainsi qu’une grande salle collective au rez-de-chaussée, espace de discussion ou de préparation de repas conviviaux. Deux machines à laver sont mises à disposition de tous dans un espace buanderie, et les voitures elles-mêmes sont partagées. En revanche, les toilettes, semi-sèches, ne sont pour leur part pas collectives…
Pas question, en somme, de rester chacun chez soi. Les cinq familles font bien plus que cohabiter au sein d’Au clair du quartier. « Ça crée des liens très forts, décrit Bénédicte. Il peut y avoir plus ou moins d’affinités entre les personnes, mais on se connaît tous très bien, on se respecte et on s’apprécie pour ce qu’on est. »
Tous différents… mais tellement proches ?
Architecte, assistante maternelle, commercial, ingénieur, technicien informatique, assistante sociale… Les profils socioprofessionnels des personnes ayant adhéré au projet sont relativement variés. « On est assez différents les uns des autres », juge Bénédicte. Sauf peut-être du point de vue générationnel, parents et enfants ayant des âges relativement proches, à dix ans près.
« On aurait aimé faire un projet intergénérationnel, mais ce n’est pas évident entre cinq familles », juge Bénédicte. Excepté un père célibataire – la séparation a eu lieu pendant la construction du projet – Au clair du quartier est composé de couples avec enfants. « Des enfants ravis, qui se retrouvent dans le jardin et vont les uns chez les autres », se réjouit Bénédicte.
Rendre l’Habitat participatif accessible à tous
La dimension environnementale du projet est également affirmée, dans le choix des matériaux comme dans le mode de consommation des fluides, ou du compostage. L’Habitat participatif, un “truc d’écolo” avant tout ? Rien d’obligatoire, pour Bénédicte. « Les groupes qui s’intéressent à l’Habitat participatif ont toujours une sensibilité à la qualité du bâtiment, à la relation au monde, décrit-elle. Mais ce sont les valeurs sociales, les valeurs de solidarité qui sont les plus importantes. »
L’association Les Habiles a d’ailleurs ouvert un « grand chantier » – « Démocratiser l’Habitat participatif » – nous dit sa cofondatrice : « Nous avions le temps, les moyens de faire ce projet en autopromotion. Mais on milite pour rendre accessible ce type de projet à d’autres personnes que nous. En impliquant des bailleurs sociaux comme l’Opac ou Actis. » Avec à la clé, demain, des HLM participatifs ?
Florent Mathieu
LA MÉTRO LANCE SON PREMIER APPEL À PROJETS DE L’HABITAT PARTICIPATIF
Le mois de l’Habitat participatif est aussi l’occasion de rappeler le premier appel à projets lancé par la Métro. « La Métropole et les communes parties prenantes de l’appel à projets souhaitent promouvoir ce mode d’habitat répondant à plusieurs enjeux d’intérêt général, en incluant l’habitant au cœur du projet », écrivent les services de Grenoble Alpes-Métropole.
Ce sont 6 terrains, situés à Grenoble, Saint-Martin-d’Hères et Champagnier, qui sont ainsi concernés par cet appel à projets. Les groupes d’habitants ont jusqu’au 30 septembre 2017 pour déposer leurs propositions.
Le cahier des charges ? « Les futurs habitants prévoient, puis gèrent le projet dans lequel ils intègrent souvent des espaces de vie partagés (jardin, salle de réunion, buanderie…), avec une architecture qui sort des standards. »
Des ateliers animés par l’association Les Habiles
Naturellement impliquée dans cet appel à projets, l’association Les Habiles propose un cycle d’ateliers à destination des porteurs de projets.
Les questions économiques, d’organisation collective ou de montage juridique seront ainsi abordées les 20 mai, 12 juin et 1er juillet à la Maison de la nature et de l’environnement de Grenoble. « Après ce cycle, des rendez-vous individuels pourront être proposés aux groupes candidats », précise enfin la Métro.