TÉMOIGNAGE – La presse est-elle libre ? Une question qui mérite plus que jamais d’être posée en cette journée mondiale de la liberté de la presse. Qui plus est dans cette période électorale où des journalistes sont tout à la fois malmenés et déconsidérés. Si les conditions de travail des médias sont catastrophiques dans un certain nombre de pays, elles sont loin d’être idéales en France. Et au niveau local ? Pas mieux…
LIBERTÉ DE LA PRESSE : LA FRANCE, 39e AU CLASSEMENT 2017… PEUT MIEUX FAIRE
Journalistes emprisonnés, torturés, voire assassinés… Au Vietnam, en Érythrée, au Turkménistan, en Syrie, en Chine… Dans bon nombre de pays, informer peut se payer très cher. Sans parler de la Corée du Nord, « où le simple fait d’écouter une radio basée à l’étranger peut valoir un séjour en camp de concentration », rappelle le classement annuel de Reporters sans frontières. Loin de s’améliorer, la situation de la presse a empiré en 2016 dans les deux tiers des 180 pays répertoriés dans le rapport. Et les violations à la liberté d’informer ne concernent pas uniquement les régimes autoritaires et les dictatures. Elles frappent aussi les démocraties, y compris en Europe.
Pour faire taire les journaux indépendants, le gouvernement polonais a ainsi opté pour l’asphyxie économique. « Après avoir transformé l’audiovisuel public en outil de propagande, le gouvernement s’est attaché à étrangler financièrement plusieurs titres de presse indépendants opposés à ses réformes (Gazeta Wyborcza, Polityka ou encore l’édition polonaise de Newsweek) en imposant aux administrations de supprimer leurs abonnements à ces journaux », précise ainsi le rapport.
Et la France ? L’Hexagone se classe 39e, loin derrière les pays d’Europe du Nord et la plupart de ses voisins. « Si la presse est globalement libre et plutôt bien protégée par la loi, le paysage médiatique français est largement constitué de groupes dont les propriétaires ont d’autres intérêts que leur attachement au journalisme. Cette situation entraîne des conflits qui font peser une menace sur l’indépendance éditoriale, et même sur la situation économique des médias », est-il précisé dans le classement. […] D’autre part, pendant la campagne présidentielle, les politiques et la population ont affiché une hostilité grandissante à l’égard des journalistes. » En témoignent les journalistes sifflés lors du meeting de François Fillon à Nice.
Le 27 avril dernier, 34 sociétés de journalistes ont même signé une tribune contre l’entrave à la liberté d’informer du Front national : déplacement de Marine Le Pen non communiqué, accréditation refusée… « À l’occasion de la campagne pour le second tour de l’élection présidentielle, le Front national a décidé de choisir les médias qui sont autorisés à suivre Marine Le Pen. Plusieurs titres de presse ont ainsi vu leur représentant tenu à l’écart de toute information et de toute possibilité de suivi sur le terrain de la candidate du Front national », indique le texte. « Ainsi, après Mediapart et Quotidien (et avant lui son prédécesseur Le Petit Journal), l’Agence France-Presse, Radio France, RFI, France 24, Le Monde, Libération et Marianne, notamment, ont été à un moment ou à un autre victimes de ces exclusives. […] »
Déplacement non communiqué, refus d’interviews, absence de réponses aux sollicitations, journalistes délibérément exclus de visites presse, pressions exercées avant ou après la publication d’articles sur des sujets sensibles… Vous pensez que ces pratiques sont l’apanage du FN ? Eh bien non ! Au risque de vous surprendre, elles ont également cours à Grenoble, où la ville est dirigée par une coalition Europe-Ecologie-les-Verts et Parti de gauche. Retour en quatre actes sur une stratégie de communication méconnue mais assumée au plus haut niveau – comme nous venons tout juste d’en avoir la confirmation – et qu’il nous a paru nécessaire de porter à votre connaissance.
Acte 1 : Le verrouillage de l’information
L’accès à l’information n’a jamais été simple depuis l’arrivée de la nouvelle équipe municipale à Grenoble en 2014 (six mois seulement après le lancement officiel de Place Gre’net). C’est notre métier d’aller la chercher, allez-vous nous dire. Bien sûr ! C’est ce que nous faisons tous les jours. Cela se passe d’ailleurs globalement bien avec les autres collectivités, y compris lorsque nous publions des articles critiques ou traitons des thèmes jugés sensibles. Les journalistes les contactent via les services presse qui leur répondent dans des délais raisonnables et fixent des rendez-vous avec les personnes sollicitées. C’est tout simple, en fait.
Avec la Ville de Grenoble, c’est plus compliqué… Petit retour en arrière. Dès novembre 2014, alors que nous avions appris que la municipalité comptait bannir l’affichage publicitaire dans l’espace urbain et ne pas reconduire son contrat avec JCDecaux, nous avions sollicité en vain l’interview de l’élue concernée, Lucille Lheureux. Le conseiller spécial du maire, Enzo Lesourt, nous avait alors demandé d’attendre la fin du mois, nous assurant que la Ville présenterait sa mesure à toute la presse locale lors d’une conférence commune. Nous avons donc sagement attendu…
Très mauvaise idée ! Tout le dossier est sorti le 22 novembre 2014, un dimanche, dans le Dauphiné libéré et le JDD. « Nous avons fait le choix du Dauphiné libéré pour l’exclusivité locale et du JDD pour l’exclusivité nationale », nous a‑t-il simplement répondu, pas gêné. Les deux journaux avaient été contactés pour l’occasion avec interviews calées à la clé. Une affaire qui roule ! C’est bien connu, les promesses n’engagent que ceux qui y croient.
“Si nous attendions à chaque fois le retour du service communication pour publier,
beaucoup d’articles ne sortiraient tout simplement jamais.”
Pourquoi revenir sur cette vieille anecdote ? Parce qu’elle est emblématique de pratiques devenues monnaie courante à Grenoble. Les élus sont bien sûr libres de répondre ou pas aux sollicitations de la presse. Mais, d’une manière générale, les journalistes de Place Gre’net qui passent par le service presse rencontrent la plupart du temps des difficultés pour accéder à l’information. Technique la plus couramment utilisée ? Le pourrissement. Si nous attendions à chaque fois un retour pour publier nos articles, beaucoup d’entre eux ne sortiraient tout simplement jamais. Ce qui est sans doute le but recherché et n’est évidemment pas concevable.
Et pour cause : le service presse, censé faciliter le travail des journalistes, est en lien direct avec le cabinet du maire… à qui il rend directement compte et qui décide de tout. Du coup, les jours passent, voire les semaines, quand ce ne sont pas les mois. Et nos demandes d’informations ou d’interviews sont classées sans suite dès qu’elles touchent à des sujets sensibles. Ce que l’on nous propose à la place ? Une multitude de conférences de presse, durant lesquelles les élus déroulent leur communication. Le tout sous l’œil attentif du conseiller spécial du maire quand il s’agit des rendez-vous les plus stratégiques.
Les explications qui sont données par le cabinet à l’absence de réponses à nos sollicitations ? « C’était pas notre rythme. C’était pas le timing. » Entendez : la Ville n’a pas prévu de communiquer à ce moment-là. « Parfois, on n’a pas envie de répondre et on ne le dit pas car on répond plus tard. » Ce fut par exemple le cas pour le budget de la Biennale. La Ville devait répondre aux questions « plus tard ». Nous attendons encore… Ce n’est presque jamais le moment, en définitive. « Je ne pars pas du principe qu’il y a convergence a priori. Chacun a son calendrier, ses critères. Parfois, ça pourra matcher [correspondre, ndlr] », nous a d’ailleurs expliqué le conseiller spécial du maire suite à des demandes d’éclaircissements.
“Lorsqu’il y a débat, les journalistes doivent pouvoir donner la parole aux deux parties,
afin que le lecteur puisse lui-même se faire son avis au fil des publications”
Autre argument mis en avant par le cabinet : Place Gre’net solliciterait trop les élus, qui n’auraient pas le temps de nous répondre. Tiens ! C’est curieux. Nous n’avons pas cette impression en lisant la presse. Du reste, quelques minutes au téléphone peuvent facilement s’insérer dans un agenda d’élu dont le travail est aussi de rendre compte de son action.
Mais surtout, il ne faudrait pas oublier que, lorsqu’il y a débat, les journalistes doivent pouvoir donner la parole aux deux parties, afin que le lecteur puisse lui-même se faire son avis au fil des publications. Aussi, quand des opposants politiques ou de simples citoyens émettent des critiques à l’encontre d’un projet municipal, il est juste de donner la parole aux “accusés” pour qu’ils puissent à leur tour présenter leurs arguments. Logique, non ?
Pas pour la Ville. En fait, notre méthode revient à « relayer des paroles qui ne sont pas au même niveau » a récemment affirmé un membre du cabinet du maire. « Nous ne voulons pas réagir à Tartempion. Une institution informe et débat mais n’alimente pas du buzz. […] Tous les points de vue ne se valent pas. Sinon, c’est l’approche du Front national. » Un point de vue déjà avancé par un autre membre du cabinet, et donc parfaitement assumé.
La Ville n’entend ainsi pas répondre aux “attaques”. Tant pis si Tartempion – collectifs de citoyens, associations, opposants politiques… – se pose des questions et attend légitimement des réponses sur l’utilisation des deniers publics, le bien-fondé ou l’efficience des mesures mises en places.
Acte 2 : les accusations de traitement déséquilibré
Et quand, derrière Tartempion, se cache Pascal Clérotte, porte-parole du Gam et bête noire de la municipalité dont il commente toutes les décisions, la Ville voit encore plus rouge. Une journaliste de Place Gre’net serait même « manipulée » par cet homme. Sous emprise peut-être ? La pauvre femme – une journaliste de plus de vingt ans d’expérience – manquerait de discernement et reprendrait sans recul tous ses arguments, notamment dans des articles consacrés au projet de piétonnisation Cœurs de ville, cœurs de métropole (CVCM). A moins qu’elle ne soit mariée à un commerçant opposé à CVCM, comme on nous l’a demandé avec le plus grand sérieux. Mieux vaut en rire !
La vérité est plus simple : Pascal Clérotte n’est qu’une source – certes très bavarde sur les réseaux sociaux et clivante… – parmi d’autres. Rien de plus. En attendant, la journaliste en question est blacklistée par la Ville. Et la garde rapprochée du maire semble vouloir instiller peu à peu l’idée que Place Gre’net aurait « une ligne » et deviendrait un « journal d’opinion » qui servirait des intérêts hostiles à la Ville.
“Il ne faut pas tendre le micro à n’importe qui !,
s’est vu interpeller un journaliste qui venait d’interroger Alain Carignon”
Ainsi, après avoir fait clairement le choix de ne pas prendre la parole suite aux sollicitations, la Ville se plaint désormais du fait que l’opposition la prend trop ou que certains articles seraient « à charge »… Sans compter les procès récurrents en “déontologie” : « Il ne faut pas tendre le micro à n’importe qui ! », s’est ainsi vu interpeller un journaliste qui venait d’interroger Alain Carignon, ancien maire de Grenoble condamné pour corruption, mais toujours actif dans la vie politique grenobloise.
Dans la même veine, certaines informations ne seraient pas bonnes à publier. Comme, lorsqu’à l’automne dernier, nous avons cité Le Postillon qui relataient des extraits issus d’un échange privé d’Élisa Martin en date du 29 juin dernier. La première adjointe de la Ville de Grenoble y écrivait : « J’ai validé le plan de sauvegarde sans faire gaffe. Quelle conne ! Une information, d’importance, relayée sur Place Gre’net, dans la nuit du dimanche au lundi 26 septembre 2016, alors qu’elle avait déjà été largement reprise sur les réseaux sociaux.
Sollicitée dans la foulée, Élisa Martin a refusé de s’exprimer, sous prétexte que Place Gre’net aurait relayé « une information qui est fausse ». « J’assume parfaitement le fait de ne plus répondre à vos interviews, ce qui est mon droit le plus strict, a‑t-elle précisé. […] Pour ce qui nous concerne, nous ne faisons pas de politique dans les caniveaux, cela ne rentre pas dans notre « plan de com ». » Voilà qui est clair. En attendant, Élisa Martin n’a jamais démenti officiellement cette information et n’a pas attaqué Le Postillon pour diffamation…
Acte 3 : Les pressions en tout genre
En dehors de la première adjointe, les élus – avec qui, soit dit en passant, Place Gre’net entretient de bonnes relations – ont toujours accepté de répondre aux questions des journalistes qui les interpellaient directement sur le terrain ou sur leur téléphone portable. Des pratiques, somme toute banales, mais qui ont déplu, car hors de contrôle de la communication. Plusieurs journalistes se sont ainsi fait taper sur les doigts après coup par le conseiller spécial du maire ou le service presse de la Ville. Ils devaient cesser de contacter les élus en direct et passer par eux « pour que ça aille plus vite ». No comment…
Place Gre’net serait-il le seul journal, avec Le Postillon, à faire grincer des dents la majorité ? Visiblement non. Le Canard enchaîné a ainsi publié un article très critique le 29 mars 2017, intitulé « Des livres rongés par les Verts”. Sans doute le premier article paru dans la presse nationale reprenant en substance les arguments des opposants à la fermeture ou à la transformation de bibliothèques. Un électrochoc pour l’équipe municipale. Très attachée, pour le coup, à ce journal, celle-ci s’est ainsi fendue d’une longue lettre ouverte. Visiblement, la pilule a eu du mal à passer…
“Voulait-on vraiment « alimenter la fachosphère », « faire du clic », « du buzz » ?
Non, juste faire notre métier : informer”
Quand les journalistes s’intéressent de trop près à des sujets sur lesquels la Ville n’a pas envie de communiquer ou pas à ce moment-là, celle-ci n’hésite pas à faire pression. Par exemple en leur passant des appels furieux sur leur portables pour les sermonner. Là encore, le problème n’est pas nouveau, puisque ce fut déjà le cas suite à la publication de l’article Propreté urbaine : Grenoble va passer à la verbalisation, paru le 30 septembre 2015. Un sujet visiblement très sensible…
Comme à l’accoutumé, les élus et responsables de services concernés à la ville de Grenoble n’avaient pas reçu l’autorisation de s’exprimer. Mais des délégués syndicaux territoriaux s’étaient montrés plus prolixes avec notre journaliste. Un crime de lèse-majesté, semble-t-il. On n’avait pas été « réglo » de traiter le sujet quand même. Et plus grave : « les deux syndicalistes interrogés n’avaient pas le droit de s’exprimer sur le sujet. » Peut-être ont-ils été punis ?
Pressions encore quand Place Gre’net a su que des élèves de l’école élémentaire Anthoard de Grenoble avaient chanté la chanson religieuse Bismillah dans le cadre d’une activité périscolaire. Un dérapage du plus mauvais effet dans une école publique qui ne devait pas être porté à la connaissance du public mais « réglé en interne »… L’occasion d’un appel d’Enzo Lesourt au journaliste chargé de l’article mais aussi à moi-même, en tant que rédactrice en chef, pour nous dissuader de publier un article sur le sujet, notamment en jouant sur la culpabilisation.
Que comptait-on écrire ? Une question pas banale déjà posée par l’intéressé à des journalistes à d’autres occasions. Voulait-on vraiment « alimenter la fachosphère », « faire du clic », « du buzz » ? Non, juste faire notre métier : informer. C’est-à-dire ne pas mettre sous le tapis une information dont nous avions eu connaissance sous prétexte qu’elle pourrait être récupérée par certains et en desservir d’autres.
Acte 4 : Les mesures de rétorsion, économiques et autres
Fait troublant mais pas si étonnant, les commandes d’encarts de communication à Place Gre’net par la Ville se sont subitement arrêtés en novembre 2016, alors que la Ville continuait de largement communiquer dans le reste de la presse. Une mesure de rétorsion économique suite à des articles ayant déplu, comme un membre du cabinet l’a clairement exprimé à un journaliste de Place Gre’net – qu’il avait demandé à rencontrer pour lui en faire part expressément – puis à moi-même.
En cause – comme nous l’avons su par la suite –, des articles qui portaient notamment sur les bibliothécaires en lutte, l’affaire Bismillah, CVCM, Ebikelabs, la Biennale de l’habitat durable, ou bien encore la Grande marche réclamant la réquisition des logements vacants à Grenoble. Sans doute une tentative pour nous faire rentrer dans le rang. Voire nous faire taire définitivement…
“L’arrêt de commande depuis novembre se solde par un manque à gagner non négligeable
pour notre jeune média, même si nous avons dès le départ diversifié les sources de revenus”
Place Gre’net, qui n’était déjà souvent pas intégré dans les plans de communication de la Ville, en serait ainsi désormais définitivement exclu. Bien loin de l”« équité de traitement à l’égard des médias locaux », spontanément annoncé en septembre 2014 par Erwan Lecoeur, le directeur de la communication de la Ville. Cet arrêt de toute commande, depuis novembre, se solde par un manque à gagner non négligeable pour notre jeune média, même si nous avons dès le départ diversifié les sources de revenus, qu’il s’agisse d’autres annonceurs ou des abonnements.
Le second événement troublant a concerné l’aspect rédactionnel, Place Gre’net ayant été délibérément exclu d’une visite presse – à laquelle ont été conviés plusieurs médias – de la Tour Perret, monument que la Ville a décidé de restaurer après des mois de débats. Ce toujours dans une logique de “sanction” selon un membre de la garde rapprochée du maire. Et cela même alors qu’un journaliste de Place Gre’net avait clairement fait part au préalable de son intention de la visiter.
« C’est n’importe quoi ! » a toutefois démenti un autre membre du cabinet. Quelle était donc l’explication de cette exclusion ? La tour Perret, fragile, n’aurait pas pu accueillir beaucoup de personnes, nous a‑t-on finalement répondu… La tour – visiblement bien plus dégradée qu’il n’y paraît – n’aurait pas supporté le poids de notre journaliste et de sa caméra !
Épilogue : faute de tête-à-tête avec le maire, une interview encadrée… et écourtée
Voilà des mois qu’une journaliste de Place Gre’net sollicitait une interview du maire, en vain. Et pour cause : celle-ci était “blacklistée” et ses demandes systématiquement écartées par la garde rapprochée du maire.
Cette interview m’a finalement été proposée alors que je sollicitais pour ma part un entretien en tête-à-tête – entendez sans communicants – avec Eric Piolle, pour savoir s’il cautionnait les mesures de rétorsion vis-à-vis de Place Gre’net. Une réponse jamais obtenue malgré des demandes d’éclaircissement formulées par mail début mars au maire lui-même et à son cabinet. Verdict ?
Oui, Eric Piolle assume pleinement l’arrêt des commandes d’encarts publicitaires à Place Gre’net. Une décision prise en concertation avec ses proches collaborateurs à ce sujet. « On a effectivement eu des débats sur la façon dont certains articles ont été positionnés […] Un débat sur la qualité de certains articles qui pose question, sur le travail qui est fait… », a‑t-il fini par reconnaître. « C’est une question de cadre de travail, a tenté de justifier son conseiller spécial, présent tout au long de l’entretien. […] On vous a dit plusieurs fois qu’il y avait des protocoles de travail à respecter si vous voulez bosser avec nous. » Dont acte.
“Une interview menée au pas de course. Et qui s’est terminée sous la menace à peine voilée de divulguer des échanges par mail”
Autre point que nous souhaitions éclaircir, le récent voyage en Israël du maire et de sa délégation qui nous a été volontairement caché, ainsi d’ailleurs qu’à la quasi-totalité des journalistes locaux jusqu’à la veille du départ… et ce malgré des questions posées bien en amont au cabinet du maire concernant le trou dans son agenda cette semaine-là.
Interrogé à ce sujet, Eric Piolle a répondu que nous n’avions pas à savoir à l’avance s’il allait s’absenter de la ville ou s’il était en vacances. Soit. Reste qu’une journaliste locale a fait partie du voyage et a donc de facto été mise au courant bien avant… Un “deux poids deux mesures” que le maire assume, tout comme la prise en charge des frais de voyage de ladite journaliste. « C’est ce qui se fait, oui… »
L’interview était calée de longue date et devait durer une heure, ce qui avait été reconfirmé en début d’interview. Mais à peine quarante minutes plus tard, au moment justement où il était question de ce voyage, le conseiller spécial du maire et une membre de son cabinet sont intervenus pour y mettre un terme… précipitamment. Le maire était très en retard ! Vite, vite, il fallait partir !
L’interview menée au pas de course s’est ainsi terminée en queue de poisson… Sans compter, après le départ du maire, des menaces à peine voilées de divulguer des échanges par mail où j’aurais dit que « Place Gre’net avait besoin des pubs de la Ville ». Une assertion totalement fausse puisqu’à aucun moment je n’ai dit, écrit ou sous-entendu cela, mais ai simplement demandé des explications sur cet arrêt soudain des commandes…
“Une chose est sûre : nous continuerons à faire notre métier, comme nous l’avons toujours fait,
honnêtement, sans volonté de nuire ni de favoriser quiconque”
Il s’agit peut-être là de la dernière interview calée officiellement par la Ville car nous avons appris le 27 avril dernier qu’un entretien promis de longue date à un journaliste de Place Gre’net par la Première adjointe Élisa Martin elle-même, après des mois de silence, n’aurait finalement pas lieu…
Une chose est sûre : nous continuerons à faire notre métier, comme nous l’avons toujours fait, honnêtement, sans volonté de nuire ni de favoriser quiconque. Car notre devoir reste d’informer, indépendamment des pratiques de communication des collectivités, des entreprises, des personnalités politiques ou autres… Sans jamais ménager quiconque aux seules fins d’entretenir de bonnes relations, d’obtenir des interviews ou des publicités. Et ce quel qu’en soit le prix.
Muriel Beaudoing, directrice de publication de Place Gre’net