FOCUS – Du silicium aux objets connectés, deux grands rendez-vous du monde high-tech – Semicon Europe et IoT Planet – ont réuni leurs forces pour montrer au public la chaîne électronique complète. Les deux salons, qui se tiennent du 25 au 27 octobre à Alpexpo, à Grenoble, proposent une vitrine de la recherche technologique et de ses applications dans le quotidien. Masque d’hypnose et miroir connectés, robe-caméléon, film créé automatiquement, ou encore dispositif permettant des diagnostics médicaux précoces… Zoom sur quelques projets exposés.
Si Semicon est un salon reconnu depuis des années par les professionnels du secteur et le public intéressé, IoT Planet (IoT pour Internet of Things, Internet des objets) est né il y a seulement un an.
L’évènement a rassemblé 400 professionnels autour d’une conférence plénière et une petite zone d’exposition dédiée aux startups fabriquant des objets connectés. Et pour cette deuxième édition, ses organisateurs ont décidé d’ouvrir les portes au grand public. La tenue de Semicon était l’occasion d’associer les deux évènements pour « proposer aux visiteurs d’aller de la plaque de silicium originale jusqu’à la production finale », explique Maria Gaillard, cofondatrice du salon.
« Il est important de mettre l’humain au cœur de ce salon, car la technologie est indissociable de l’humain. » La preuve de l’intérêt du grand public ? Cette année, un tiers des visiteurs inscrits en ligne ne sont pas des professionnels des secteurs high-tech. « Cette ouverture nous différencie d’autres salons similaires », précise Maria Gaillard, en ajoutant que le choix de créer le salon IoT à Grenoble n’est pas anodin : « L’écosystème grenoblois est parfait : ici, tout est réuni autour de IoT : recherche, grands groupes industriels, incubateurs etc. »
AirNodes, le miroir connecté
Un miroir qui peut vous servir de pense-bête, afficher la date ou les prévisions météo, remplacer une ardoise dans un restaurant ou encore aider des personnes atteintes d’Alzheimer à se rappeler de leurs activités journalières… Loin de la science-fiction, le projet est déjà lancé par la société AirNodes, « constructeur de solutions connectées sur mesure pour les entreprises ».
Les quatre entrepreneurs de la jeune startup ce sont inspirés « des vidéos sur Internet montrant des bricoleurs en train de fabriquer des miroirs connectés » pour créer un objet destiné à promouvoir leurs compétences. Le projet est « co-développé avec un hôtel 5 étoiles de Courchevel, qui aura cinq miroirs connectés dans les espaces communs », explique Quentin Nigi, directeur général d’AirNodes.
Leurs compétences en informatique embarquée permettent « d’apporter une solution sur mesure à chaque client. Quant aux miroirs, ils permettent d’afficher ce qui correspond à son business. » Des exemples ? « Le menu d’un restaurant ou le temps d’attente pour les clients d’un restaurant à emporter. Nous prêtons aussi un miroir à un Ehpad (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) qui veut améliorer le quotidien de ses patients Alzheimer : afficher les rappels, la date, les activités…
Rocamroll : « des vidéos attrayantes faites automatiquement »
Le dispositif « Rocamroll », proposé par la société Mean-in-full, permet, lui, la captation et le montage automatique de vidéos en temps réel. Il ne s’agit cependant pas de films artistiques, mais de vidéos de conférences, séminaires ou formations.
L’objectif ? « Réaliser un film attrayant et plaisant sans s’occuper de rien », précise avec le sourire le cofondateur et directeur général, Thierry Cravoisier. « Tous les prestataires techniques sont intéressés par ce dispositif, car cela leur permet d’élargir le champ d’applications et de donner un deuxième souffle à leur activité, en travaillant, par exemple, pour de petits évènements qui ne peuvent pas financer la prestation de régie traditionnelle. » Aspect à ne pas négliger : le coût. Un mois de location de ce dispositif a le même prix qu’une journée de location de régie “classique”.
Quel est donc le mode opératoire de Rocamroll ? Quelques caméras intelligentes, dotées de capteurs de mouvements et d’un dispositif de reconnaissance faciale, analysent en direct la scène « pour savoir s’il y a quelque chose à filmer dedans », précise Bruno Zoppis, cofondateur et directeur technique du projet. « L’analyse réalisée en direct par ordinateur permet de varier les plans et d’avoir du dynamisme. Et tout cela en automatique et de façon nomade : le dispositif rentre dans deux valises à roulettes. Nous pouvons l’installer en moins de vingt minutes et lancer l’enregistrement depuis un smartphone. »
Dreaminzz : masque d’hypnose et de sommeil pour « compter les moutons 2.0 »
Le projet Dreaminzz croise, quant à lui, l’ingénierie avec l’hypnose et la psychologie pour créer un masque d’hypnose et de sommeil. Actuellement, le produit, exclusivement utilisé par des professionnels, leur permet de faciliter l’accès à l’hypnose dans le cadre de leur pratique, médicale ou sportive.
« L’idée est de proposer un décor dans lequel les utilisateurs évoluent dans leur tête et d’aller vers leur objectif, comme la relaxation ou la motivation », explique Guillaume Gautier, le cofondateur du projet et praticien passionné de l’hypnose depuis une dizaine d’années.
Les domaines d’application ? Milieu hospitalier, maisons de retraite, compagnies aériennes ou encore salons de beauté… Le masque Dreaminzz est déjà utilisé par des dentistes, médecins, kinésithérapeutes ou encore des coaches sportifs. Précision importante : le dispositif ne se substitue pas à la thérapie. « Il peut être utilisé, par exemple, lorsque nous n’arrivons pas à nous endormir, la veille d’une opération, pour évacuer le stress avant de faire une conférence en public ou encore pour booster la concentration ou la motivation avant une performance sportive. »
Une autre application possible est la rééducation du sommeil. « Le masque peut être programmé pour s’endormir intelligemment, en jouant sur la cohérence cardiaque, le rythme de respiration et de pensées. La personne sera plongée dans l’état propice à l’endormissement. » Dans la même logique, l’utilisateur du masque pourra programmer son réveil avec un simulateur d’aube. « C’est “compter les moutons 2.0”, compare Guillaume Gautier en souriant.
L’expérience se veut spatialisée et la plus immersive possible : le son diffusé en stéréo dans un casque contient un récit hypnotique. Quant au masque, il est piloté par une application mobile : des leds créent des stimulations visuelles renforcées par la vibration. « Ainsi, on veut déconnecter la personne et créer une métaphore. Par exemple, pour des sportifs qui préparent un effort physique, on recrée l’univers de Gladiateur. (…) L’hypnose permet d’accorder le crédit à son imaginaire, de lui donner un potentiel réel ».
Smart Force Technologie : le « nano-golf »
Manipuler et ordonner les nanoparticules. Telle est l’ambition de Smart Force Technologie, qui développe et vend depuis décembre 2015 des équipements de nano-fabrication à destination de la médecine, de la science, de la micro-électronique et des télécommunications.
« Depuis une dizaine d’années, les chimistes savent fabriquer des nanoparticules avec des propriétés très intéressantes. Mais, actuellement, il n’existe pas de solutions pour les manipuler », explique Olivier Lecarme, cofondateur du projet.
Le premier produit de cette startup, actuellement en incubation à Linksium, société d’accélération du transfert de technologies, permet « de faire du dépôt et de l’organisation contrôlée de n’importe quel type de nanoparticules, situées initialement dans un liquide, sur une surface. C’est comme du nano-golf ».
Dans le domaine de la santé, ce dispositif permet de créer des systèmes ultra-sensibles capables d’amplifier un signal de très faible quantité de molécules et de réaliser un diagnostic d’allergie ou un diagnostic précoce de cancer.
« Le domaine des nanoparticules commence à passer des laboratoires à la sphère industrielle », confie le cofondateur de l’entreprise. « L’utilisation de nanoparticules pour créer des circuits photoniques est l’une de voies explorées pour le futur de la micro-électronique ».
Fashiontech, une vitrine de la mode qui intègre la technologie
Robe-caméléon, masque anti-pollution, parapluie qui prédit la météo… La vitrine Fashiontech a réuni créativité et technologies. Avec quelques créations, facilement utilisables dans la vie de tous les jours, que le magazine Modelab créé par Fabrice Jonas, passionné par ces deux domaines, a présenté lors du salon IoT Planet.
Les portefeuilles De Rigueur, par exemple, rechargent les smartphones, dotés de fonction d’induction à un rythme de 1 % par minute. Les foulards anti-pollution conçus par Wair ne sont pas des objets connectés, mais customisés : des masques anti-pollution sont intégrés dans les foulards, objets de mode destinés aux habitants des grandes villes confrontés à la pollution urbaine. Le parapluie OOmbrella, connecté à une application mobile, prédit quant à lui la météo et envoie un signal à son propriétaire s’il l’oublie.
Même si la mode adopte aujourd’hui des objets connectés, elle demeure un « univers de création plutôt qu’industriel », estime Christine Bout de l’An, coorganisatrice du stand fashiontech.
Enfin, la robe-caméléon, créée par Claire Eliot, est reliée à une application mobile et intègre un capteur qui permet de changer la couleur des éléments du vêtement grâce à l’analyse d’un spectre de couleurs. Un rayonnement des technologies au sens littéral.
Yuliya Ruzhechka