REPORTAGE VIDÉO – Faciliter les déplacements des piétons et mettre en avant l’offre de transports en commun. Tels sont les objectifs de l’expérimentation collaborative sur les mobilités « Chrono en marche ! » pilotée par l’opérateur Transdev. Testé dans le périmètre du quartier Bouchayer-Viallet, le projet vise aussi à ouvrir le quartier sur l’extérieur et à améliorer la visibilité des différents équipements sur l’espace public.
« La première leçon que les habitants qui ont été concertés nous ont donnée et qui guide désormais le projet, c’est “Donnez-nous envie de devenir piétons” », rapporte Yann Mongaburu, président du Syndicat mixte des transports en commun (SMTC).
Une phrase qui prend tout son sens lorsque l’on sait qu’en France, 22 % des déplacements locaux se font pedibus cum jambis. Autrement dit, à pied.
Saviez-vous aussi que, dans les grandes agglomérations, les habitants marchent en moyenne de 15 à 20 minutes par jour ? De quoi expliquer que Chrono en marche !, projet collaboratif sur les mobilités, soit passé en phase de test grandeur nature le 1er juillet dernier dans le quartier Bouchayer-Viallet, à l’initiative du président du SMTC, accompagné de Philippe Chevry, directeur de la Semitag, et de Francis Chaput, directeur délégué aux Grands Réseaux Urbains chez Transdev.
Rendre plus attractive l’offre de transports en commun
Pourquoi Chrono en marche ? Chrono c’est le nom de la ligne de bus qui dessert le quartier Bouchayer-Viallet, la ligne C5. Cette dernière souffrant d’un certain manque de visibilité, voire de notoriété, il est apparu nécessaire de mettre plus en avant l’offre de transports en commun, de la rendre plus attractive. Mais pas seulement. Ouvrir le quartier sur l’extérieur et favoriser la marche urbaine sont autant d’autres défis que se propose de relever le projet.
Porté par le SMTC et piloté par Transdev, le partenaire industriel et commercial de la Semitag, Chrono en marche est l’un des dix projets innovants menés de front par l’incubateur Lemon, le Laboratoire d’expérimentation des mobilités de l’agglomération grenobloise.
Des projets qui s’articulent autour de cinq grands axes : l’intermodalité, le développement durable, l’accessibilité, le citoyen-voyageur et la collaboration. L’objectif de Lemon ? : bâtir des projets innovants capables de renforcer l’attractivité du réseau Tag et favoriser sa fréquentation.
Le tout en s’appuyant sur l’expérience des usagers et la promotion de la coproduction.
Au nombre de ces innovations, Monetrans, le boîtier de paiement « sans contact » par carte bancaire, actuellement testé par les voyageurs circulant sur l’une des lignes du réseau Tag.
Pour le laboratoire, le projet Chrono en marche ! représente un vrai challenge. Il s’agit ni plus ni moins que de préfigurer un nouveau modèle de station de bus, tout en intégrant l’environnement du quartier Bouchayer-Viallet. Le but recherché ? Favoriser la marche urbaine.
Plus d’un millier de contributions enregistrées !
Mais il y a loin de la coupe aux lèvres, Chrono en marche c’est aussi le résultat d’une méthodologie. C’est en effet au cours de l’année 2015 qu’ont été posés les premiers jalons du projet. Les habitants, usagers et riverains du deuxième écoquartier de Grenoble, ont été invités à formaliser leurs idées. « Nous leur avons demandé comment ils voulaient voir, demain, leur quartier évoluer, comment donner une dimension “augmentée” au réseau de transports en commun », explique Yann Mongaburu.
Notamment imaginer de nouveaux services et usages, repenser leur quartier et plus largement la ville ou encore exposer leurs besoins en termes de mobilités.
Le tout avec pour seule contrainte de laisser libre court à leur imagination… qui s’est révélée foisonnante.
Le résultat de cette concertation ? Un franc succès puisque plus d’un millier de contributions ont ainsi été enregistrées – sur tablettes numériques – par les médiateurs de l’opérateur de mobilité Transdev, l’un des partenaires majeurs du projet. Aussi, loin d’en rester là après ce remue-méninges créatif, était-il temps, pour les vivre, de passer à l’expérimentation ciblée et concrète de quelques-unes des solutions imaginées.
« Il y a toujours un moment où il faut marcher »
C’est en effet le postulat de départ : la marche envisagée comme mode de déplacement universel. « Quel que soit le mode de déplacement utilisé, les transports en commun, la voiture, le vélo, il y a toujours un moment où il faut marcher », souligne Yann Mongaburu.
« Le pas d’aujourd’hui c’est d’essayer, dans un quartier innovant, historique et recomposé, de tester ce questionnement de la transition vers les modes de mobilité de demain […] et, pour cela, il nous faut repartir de ce qu’il y a de plus universel », expose posément le président du SMTC.
En question, la visibilité des différents équipements sur l’espace public.
Notamment la qualité des cheminements et la possibilité de se repérer facilement. Mais pas seulement. Il s’agit aussi de relativiser les temps d’attente, tout en « redonnant du plaisir à la marche ». Le but poursuivi est de sensibiliser le piéton afin de l’amener « dans les meilleures conditions aux diverses solutions de transport en commun ».
Le temps de l’expérimentation
Signalétique au sol pour prendre en charge l’usager à l’arrêt de bus et l’accompagner à sa destination finale, kakémonos, customisation et sécurisation des abribus et peut-être, à terme, un banc connecté… Voilà quels sont, parmi les 1.054 projets imaginés par les contributeurs, ceux qui sont testés en grandeur réelle depuis le 1er juillet. Tour du propriétaire.
Reportage Joël Kermabon
Un projet qui s’étale sur trois ans
Pour autant, pas de précipitation, rien ne presse, l’équipe veut se donner le temps de la réussite. Chrono en marche, ce sont trois étapes qui s’étalent sur trois ans : imaginer, expérimenter et valider. Après les temps de l’imagination et de l’expérimentation, viendra, de janvier à juin 2017, celui de l’évaluation.
Les retours et suggestions des riverains seront ainsi analysés et traduits en un projet « idéal », lequel pourra être déployé sur d’autres lignes. « Nous sommes dans une première phase d’expérimentation de ces nouveaux équipements. Nous allons examiner si ça fonctionne bien. Si c’est le cas, nous les pérenniserons et si ça ne fonctionne pas bien, nous n’hésiterons pas à les faire évoluer », assure Francis Chaput, le responsable de l’économie mixte chez Transdev.
Joël Kermabon
Un banc multi-usages équipé à terme de services connectés
C’est à quatre étudiants du laboratoire Digital RDL, qui suivent le master « Architecture, ambiance et cultures numériques » de l’École nationale d’architecture de Grenoble (Ensag), que l’opérateur Transdev a confié un projet de banc public d’un nouveau genre. Partis d’une simple idée, ils ont dessiné et modélisé en 3D les différents profils d’assises d’un véritable ovni. Un mobilier urbain, long de 50 mètres, destiné à servir de trait d’union entre l’abribus Cémoi et l’intérieur du quartier Bouchayer-Viallet.
« Ce banc public invite à transformer l’attente de son bus en une expérience, en apportant un autre regard sur le quartier, en favorisant le lien social », résume Sonia Lavadhino, anthropologue sollicitée dans la phase de pré-conception du projet.
Un banc donc, mais pas seulement, il est envisagé d’y intégrer, à terme, des services connectés.
Pour l’heure, lesdits services ne sont pas encore définis, ce sera la tâche qui sera confiée à un groupe de travail dès cet automne. La construction du banc pourrait alors démarrer, laquelle serait confiée à un autre groupe d’étudiants placés sous le tutorat des concepteurs.
Phlippe Liveneau, enseignant architecte à l’Ensag et responsable du master, nous présente les grands pans du projet de banc multi-usages connecté.
Reportage Joël Kermabon