REPORTAGE PHOTO – En pleine préparation de Noël, deux chocolateries artisanales de Grenoble nous ont ouvert leurs portes. Plongée en coulisses dans cet univers de créations gourmandes au sein des ateliers Zugmayer et de Thierry Court, alors que ce dernier vient de recevoir la « Tablette d’argent » du Guide des croqueurs de chocolat.
La journée des chocolatiers commence bien avant le lever du soleil. Rendez-vous est donc pris à 6 heures du matin avec les artisans de la Chocolaterie Zugmeyer dans leur atelier de Saint-Martin-le-Vinoux. Dès l’entrée, l’odeur de chocolat nous enveloppe de sa douceur et nous plonge dans une atmosphère chaleureuse et accueillante.
Sourire aux lèvres, on se retrouve dans un paradis pour gourmands. « Le chocolat est un bon antistress ! », confirme Patrice Besson, qui dirige les Chocolats Zugmeyer avec sa femme Audrey. Une affaire familiale depuis 1960 qu’a récemment rejointe leur fils.
En période de fêtes, cinq chocolatiers – Jean-Pierre, Benjamin, Pierre, Sébastien et Clément – assurent la production, contre trois employés en temps normal. Il faut dire que la période de Noël représente 55 % du chiffre d’affaires annuel de l’entreprise, avec la fabrication de pas moins de six tonnes de gourmandises.
Matière première de cet atelier, en provenance du monde entier : la brique de chocolat. Cette dernière, qui contient le beurre et la pâte de cacao, possède un goût très dense et très amer. Elle n’est donc pas utilisée seule, mais mélangée à d’autres produits.
Et pour cause : même les amateurs de chocolat ont du mal à en manger un petit morceau, tellement son goût la différencie du chocolat travaillé.
Pour transformer la matière première en produit final, il faut d’abord faire bouillir la crème.
Cette crème chaude est ensuite mélangée avec du chocolat pour le faire fondre et ainsi donner aux deux ingrédients une texture homogène. Ce mélange est alors généralement refroidi dans des bacs de glace.
Le temps de production peut varier de quatre heures (pour les truffes, par exemple) jusqu’à deux jours pour certains chocolats, comme les Franciscains ou les Malakoffs.
Pour réaliser leurs carrés de chocolat à la perfection, les artisans coulent la préparation dans des cadres spéciaux, avant de les laisser durcir puis de les découper avec « la guitare ».
Le chocolat doit ensuite être enrobé et refroidi.
Thierry Court, artisan-pâtissier passionné de chocolat
Le jour de notre visite dans l’atelier de Thierry Court, le chocolatier travaille avec Maxime, un apprenti. Ils vont tous deux enrober, en l’espace d’une journée, 100 kg de chocolat qu’ils ont préparés durant trois jours.
« La maîtrise de cette partie de travail nécessite également des connaissances techniques et technologiques », explique Thierry Court. « Ce métier est encore très jeune – il a une centaine d’années d’histoire –, et tel qu’on l’exerce aujourd’hui, avec ces machines dans la production, il n’a qu’une trentaine d’années. »
La demande pour la période de Noël impose un rythme de travail soutenu. A l’occasion des fêtes de fin d’année – qui impliquent une préparation démarrant en octobre –, Thierry Court produit ainsi environ 800 kg de chocolat, soit environ la moitié de la production annuelle.
Installé à Grenoble depuis 2002 en tant qu’artisan-pâtissier, celui-ci développe essentiellement son activité de chocolatier depuis quelques années. « Ma propre gourmandise m’avait donné l’envie de devenir chocolatier », résume l’artisan, récemment distingué « Tablette d’argent » par Le Guide des croqueurs de chocolat 2016 et comme « Coup de cœur français ».
Qu’est-ce qui différencie le chocolat artisanal de l’industriel ?
Pour Thierry Court, aucun doute : c’est la qualité des fèves de cacao qui distingue le chocolat industriel de l’artisanal. Un avis partagé par Jean-Pierre, le chef d’atelier de production des Chocolats Zugmeyer : « Lors de la production industrielle, des huiles végétales sont souvent ajoutées au chocolat », explique-t-il.
Comment faire la différence quand on est un gourmand ? Le bon chocolat fait un bruit caractéristique lorsqu’on casse une tablette. Il est plus fondant et son goût reste plus longtemps en bouche.
« Le chocolat est révélateur de la personnalité du chocolatier, résume Thierry Court. Moi, par exemple, je veux que mes chocolats aient un goût franc : que l’on sente tout de suite ce que l’on mange. »
L’artisan a créé un chocolat pour chacun de ses trois enfants en essayant de retranscrire, grâce à des saveurs, leur personnalité : pour sa fille Lilly, par exemple, il a choisi de marier les goûts de cassis et de violette, « doux et féminins ».
Comment devient-on « bijoutier du goût » ?
Pour réussir dans ce métier, il faut certes être passionné, mais pas seulement. « Pour devenir chocolatier, il faut être rapide et précis. Et… il faut aimer bien manger ! », affirme Jean-Pierre avec un large sourire.
Thierry Court, dont le métier est également une passion « artistique et gustative », rejoint son confrère en ajoutant que, pour être chocolatier, « il faut avoir une palette de goûts, être curieux, goûter beaucoup de chocolats et savoir ce qui se fait chez les confrères. Dans un carré de 10 grammes, il faut trouver l’équilibre parfait entre le goût et la texture. Et cela peut se jouer au demi-gramme près. On est des bijoutiers du goût ! »
Yuliya Ruzhechka
Infos pratiques
Thierry Court Créations,
22 rue de la Poste, 38000 GrenobleChocolats Zugmeyer
4 bd Agutte Sembat, 38000 Grenoble