DÉCRYPTAGE – Laurent Wauquiez sort grand vainqueur des régionales en Auvergne-Rhône-Alpes. Les citoyens ont choisi le changement, après onze années d’une majorité à gauche. Lot de consolation pour les sortants, l’Union de la gauche fait son meilleur score en Isère – rétrogradant le Front national à la troisième place – et confirme son ancrage à Grenoble.
« Le travail, pas l’assistanat, priorité à la question de la sécurité, une République ferme face au communautarisme… » Les idées martelées pendant toute sa campagne par Laurent Wauquiez ont visiblement séduit. Le candidat de “la droite dure”, a remporté les élections régionales en Auvergne-Rhône-Alpes, ce dimanche 13 décembre.
Avec 40,61 % des suffrages exprimés (contre 31,73 % au premier tour), l’Union de la droite conquiert ainsi la deuxième plus grande région de France, après l’Île de France.
La gauche, qui s’est rassemblée hâtivement entre les deux tours derrière Jean-Jack Queyranne, président PS sortant, n’a pas su rassembler et n’a donc pas fait le poids. Elle obtient 36,84 % des suffrages. La liste du FN et son candidat Christophe Boudot – qui se plaçait deuxième avec 25,52 % au premier tour – descend d’une marche et prend la troisième place avec 22,55 % des scrutins.
A l’échelle nationale, l’Union de la droite remporte sept nouvelles grandes régions. La gauche en conserve cinq. Aucune des treize nouvelles régions ne sera dirigée par le FN, alors que le parti de Marine Le Pen détenait les scores les plus importants dans six régions, au sortir du premier tour.
Réalisation : Véronique Magnin, JK Production.
Victoire de la droite : quelles explications ?
L’Union de la droite (LR-UDI-MoDem) dirigera la région Auvergne-Rhône-Alpes avec une majorité de sièges : 113 sur 204 au total. Les résultats obtenus par l’Union de la gauche et le FN leur octroient respectivement 57 et 34 sièges.
Après avoir remporté le premier tour, l’Union de la droite a ainsi remporté la deuxième manche en ratissant, vraisemblablement, du côté du parti Debout la France, en “aspirant” des électeurs du FN et, sans doute aussi, en glanant quelques voix d’abstentionnistes.
Réagissant chez nos confrères de France 3 Alpes au cours de la soirée électorale, Régis Juanico, député PS de la Loire de la Drôme se montrait résigné : « Au bout de deux, trois mandats, il n’est pas anormal qu’il y ait une alternance politique. »
Michel Destot, député PS, ancien maire de Grenoble, observait cette sorte de fatalité électorale : « Les élections intermédiaires sont souvent remportées par l’opposition au pouvoir en place. » Tout en s’empressant de dénoncer le fait que « Laurent Wauquiez [ait] joué sur les peurs » pour remporter la victoire. Pour Eric Piolle, maire EELV de Grenoble, il va de soi que « c’est aussi la politique de François Hollande qui nous conduit là où nous sommes ».
Bruno Desies, tête de liste FN en Isère et troisième sur le podium, endossait lui les habits de la victime du « régime UMPS, qui se défend », soutenu par « les médias qu’il finance » et qui gagne grâce à un mode de scrutin « totalitaire ».
La gauche « revient » en Isère
Éliane Giraud, tête de liste de l’Union de la gauche (élargie entre les deux tours) en Isère, avait le sourire : « Je suis satisfaite », a‑t-elle lâché au cours de la soirée.
La candidate de la liste de l’Union de la gauche – rebaptisée pour le deuxième tour « La gauche, les démocrates et les écologistes » – culmine à 40,15 %.
Entre le premier et le deuxième tour, la gauche a ainsi repris la tête dans de nombreuses communes gagnées par le FN au premier tour.
C’est notamment le cas à L’Isle‑d’Abeau (40,46 %), au Pont-de-Claix (45,67 %) – dirigée par le maire Christophe Ferrari, président PS de la Métropole grenobloise –, à Villefontaine (45,87 %), Tullins (41,37 %), Fontaine (49,74 %), ou bien encore Échirolles (49,05 %).
Réalisation : Véronique Magnin, JK Production.
En Isère, où la gauche a donc réussi à rassembler, Yannick Neuder, tête de liste LR-UDI-MoDem, est deuxième avec 34,84 % des voix.
Déconvenue pour Bruno Desies, candidat de la liste FN, qui n’engrange « que » 25,01 % (soit deux points de moins qu’au premier tour), se retrouvant en troisième position alors qu’il était en tête.
En incluant la Métropole lyonnaise, l’Isère compte parmi les cinq départements sur treize en Auvergne-Rhône-Alpes qui placent en tête la liste de l’Union de la gauche.
Forte de son succès, Éliane Giraud reste pugnace pour la suite : « Nous dirons les choses, nous irons sur le terrain… et espérons remporter les prochaines élections. » Au conseil régional, l’Isère comptera 34 élus : 16 pour la droite, 11 pour la gauche, 7 pour le FN.
Grenoble maintient son ancrage à gauche
La liste « La gauche, les démocrates et les écologistes » de Jean-Jack Queyranne atteint un très bon score à Grenoble avec 57,19 %, loin devant l’Union de la droite (LR-UDI-MoDem) avec 29,78 %. Le FN ne glane “que” 13,03 % des suffrages exprimés.
Bras de fer en perspective dans l’agglomération grenobloise
Jean-Pierre Barbier, président (LR) du conseil départemental de l’Isère, se félicitait de pouvoir désormais compter sur une région du même bord politique.
« Nous serons aux côtés de la majorité départementale pour soutenir en Isère le Center parc, la construction de l’A480… », réaffirmait pour sa part Yannick Neuder, tête de liste (LR-UDI-MoDem) en Isère.
Des projets contre lesquels Eric Piolle, maire de Grenoble, entend bien se battre bec et ongles : « Il faut sortir des dogmes et éviter de faire un deuxième vallée du Rhône avec de vieux projets tels que l’A480… »
Christophe Ferrari, président PS de la Métropole grenobloise, présage des difficultés à venir : « Laurent Wauquiez doit respecter les électeurs de la Métropole grenobloise qui ont voté PS et ne pas être dans une attitude d’écrasement… Je n’accepterai pas qu’il pilote sans respect des autres acteurs. »
Réalisation : Véronique Magnin, JK Production.
A gauche de la gauche, on se prépare à « lutter » annonçait Patrick Voir, candidat PC sur la liste de l’Union de gauche d’Éliane Giraud, car « ce sont les politiques publiques qui vont être mises à mal ».
Quant à Myriam Laïdouni-Denis, candidate en Isère (EELV-Parti de gauche-Nouvelle Donne) qui a rejoint la liste d’Éliane Giraud, elle ne cachait pas son inquiétude :
« La politique de Laurent Wauquiez va à l’encontre de l’urgence climatique et sociale […] C’est évident que cette politique ne va pas dans le bons sens […] Nous serons des élus de combat. »
Séverine Cattiaux
Une participation en hausse de près de 10 points en Isère
L’abstention en Isère a reculé au second tour, avec un taux de participation supérieur de dix points (53,49 % de participation contre 44,50 % au premier tour). A Grenoble, les électeurs se sont davantage mobilisés au second tour (57,47 % au second tour, contre 48,31 % au premier).