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Caroline Guiela Nguyen, metteure en scène de la cie Les Hommes approximatifs. © Jean-Louis Fernandez

Caroline Guiela Nguyen : “En groupe, le théâtre est plus fort !”

Caroline Guiela Nguyen : “En groupe, le théâtre est plus fort !”

ENTRETIEN – Caroline Guiela Nguyen fait par­tie de cette nou­velle géné­ra­tion de met­teurs en scène adou­bée par la cri­tique comme par le public. Sa der­nière pièce, Le Chagrin, est pro­gram­mée à la MC2 du 1er au 5 décembre. On y observe le manège, déli­cieu­se­ment régres­sif, d’un frère et d’une sœur confron­tés à l’absence du père.

Caroline Guiela Nguyen, metteure en scène de la cie Les Hommes approximatifs. © Jean-Louis Fernandez

Caroline Guiela Nguyen, met­teure en scène de la Cie Les Hommes approxi­ma­tifs. © Jean-Louis Fernandez

On prête à cette der­nière décen­nie théâ­trale un par­fum de renou­veau. L’esprit de col­lec­tif, déjà à l’œuvre dans les années 1970, se réin­vite sur les planches.

Un retour à la créa­tion col­lé­giale qu’incarne, notam­ment, la com­pa­gnie Les Hommes approxi­ma­tifs, basée à Valence.

Terminée l’hégémonie de l’auteur et du met­teur en scène ?
Chez la plu­part des col­lec­tifs et com­pa­gnies refu­sant la créa­tion hié­rar­chi­sée, les médias – nous com­pris – retiennent sur­tout la figure du met­teur en scène… À tort ?

Caroline Guiela Nguyen, jeune met­teure en scène, explique la manière de créer de sa compagnie.

Pourquoi ce tra­vail collectif ?

En groupe, on est plus fort. Sans l’affirmer de façon poli­tique au début, j’ai sim­ple­ment constaté que c’était réel. Nos spec­tacles sont plus forts que quand j’étais toute seule dans mon coin à rêver sans les membres de la compagnie.

Malgré tout, je reste à l’initiative des pro­jets. Ne pas hié­rar­chi­ser les choses ne veut pas dire que tout le monde fait tout. Moi, je mets vrai­ment en scène et l’éclairagiste réa­lise la créa­tion lumière… On avance tous ensemble dans la créa­tion avec nos outils propres.

Autre notion impor­tante qui va sou­vent de pair avec le tra­vail en col­lec­tif : l’écriture au pla­teau. Pour Le Chagrin, n’y avait-il aucun texte préexistant ?

C’est la pre­mière fois qu’on ne part d’aucune matière tex­tuelle. Sur Elle brûle (pré­cé­dent spec­tacle de la com­pa­gnie, ndlr), on était parti de L’ Adversaire d’Emmanuel Carrère et de Madame Bovary de Flaubert. Pour Le Chagrin, on est parti davan­tage de la notion de cha­grin et d’une situa­tion : un frère et une sœur qui se retrouvent après la mort de leur père. Ensuite, les comé­diens cherchent, impro­visent. Je filme. On dis­cute. Il y a tout un tra­vail de mon­tage, proche du cinéma, jus­qu’à ce qu’on arrive à l’histoire.

La scénographie du "Chagrin" évoque des autels du souvenir à la croisée de l'art brut et des temples mexicains. © Jean-Louis Fernandez

La scé­no­gra­phie du « Chagrin » évoque des autels du sou­ve­nir, à la croi­sée de l’art brut et des temples mexi­cains. © Jean-Louis Fernandez

Têtes de pou­pées agglo­mé­rées, jouets dégueu­lant du four, bric-à-brac impen­sable bai­gnant dans une lumière bleu­tée… La scé­no­gra­phie du Chagrin est si mar­quante que cri­tiques et spec­ta­teurs en parlent presque davan­tage que du récit ou du jeu. Comment le décor s’est-il inventé avec Alice Duchange, la scénographe ?

Je tra­vaille avec la scé­no­graphe non pas pour qu’elle réponde à une demande de ma part mais pour qu’on invente ensemble un ima­gi­naire com­mun. Alice m’a parlé d’art brut, moi de temples au Mexique… La scé­no­gra­phie est très impor­tante pour nous car elle est là dès le pre­mier jour des répé­ti­tions. Les acteurs vont impro­vi­ser dans ce cadre.

Ce décor, d’abord ima­giné pour la petite scène de La Fabrique de Valence, réclame de la proxi­mité pour en per­ce­voir les détails. Est-ce que la salle René Rizzardo de la MC2, plus vaste, per­met­tra cela ?

Vincent (Dan Artus) et sa tante (Violette Garo-Brunel) dans "Le Chagrin". © Jean-Louis Fernandez

Vincent (Dan Artus) et sa tante (Violette Garo-Brunel) dans « Le Chagrin ». © Jean-Louis Fernandez

Il y a eu des inquié­tudes mais c’est fini parce qu’on l’a jouée de nom­breuses fois dans des salles plus grandes que la salle René Rizzardo de la MC2. Ce n’est pas exac­te­ment le même rap­port, c’est cer­tain. Mais le spec­tacle n’est pas déna­turé par la salle.

Au moment de la créa­tion, ça avait été très impor­tant pour nous cette inti­mité et puis on est vite parti sur des pla­teaux plus grands. Et en fait, le spec­tacle s’est agrandi à la hau­teur des plateaux…

À Valence, la pièce du décor a des dimen­sions réa­listes. Elle pour­rait s’apparenter à une chambre, un salon… Dans les autres salles, la scéno s’est élar­gie de deux mètres donc on n’est plus du tout dans des pro­por­tions réa­listes. Du coup, les spec­ta­teurs ne peuvent plus avoir cette inter­pré­ta­tion réa­liste de l’espace. Ils ne sont plus dans une pièce… mais dans une fabrique à cha­grin. C’est plus abs­trait. Et fina­le­ment on avait pensé l’espace comme ça.

Il est ques­tion de deuil dans la pièce mais le rire affleure très sou­vent via le carac­tère par­fois absurde du texte et des situa­tions. Comment le public reçoit ces varia­tions de registre ?

Face au chagrin, le langage de la fratrie fait défaut. Retour au ludique. © Jean-Louis Fernandez

Face au cha­grin, le lan­gage de la fra­trie fait défaut. Retour au ludique. © Jean-Louis Fernandez

Ça dépend. Le spec­tacle est construit sur un ter­rain sis­mique dans le sens où, comme il est bâti sur des impro­vi­sa­tions, il varie d’une repré­sen­ta­tion à l’autre. Certaines sont plus mélan­co­liques, d’autres plus lumi­neuses. Dans d’autres encore, le jeu de l’enfance va davan­tage per­cer, ou au contraire la mort va être plus pré­sente. Ces varia­tions-là, j’aime beau­coup qu’elles conti­nuent à exis­ter, que chaque soir, fina­le­ment, les acteurs entrent dans une nou­velle his­toire à déplier.

Ça dépend du public aussi, le spec­tacle est très poreux. Les gens ne rient pas à la même chose.

Propos recueillis par Adèle Duminy

INFOS PRATIQUES

MC2 : Grenoble

4 rue Paul Claudel

« Le Chagrin », de la cie Les Hommes approximatifs

Mardi 1er et ven­dredi 4 décembre, à 20 h 30

Mercredi 2, jeudi 3 et samedi 5 décembre, à 19 h 30

De 6 à 25 euros

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