DROIT DE SUITE - Le 29 juillet 2015, la ville de Grenoble procédait au démantèlement du camp Esmonin, après avoir interpellé l'État sur ses obligations régaliennes en matière d'hébergement. Deux mois après jour pour jour, force est de constater que tous les occupants n'ont pas été relogés. État des lieux de la situation des Roms dans l'agglomération grenobloise.
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La vidéo a fait le tour des réseaux sociaux : vendredi 11 septembre 2015, dans une rue de Saint-Martin-d'Hères, une petite foule de riverains se regroupe devant un immeuble « squatté » par une famille rom. Son objectif est clair : contraindre sous la pression ces personnes à quitter les lieux. Au bout de plusieurs heures d'invectives, elle obtiendra gain de cause.
Aucune agression physique à déplorer, peut-être grâce à l'intervention des forces de l'ordre, mais les images et les propos tenus n'en demeurent pas moins violents. Un collectif de personnes solidaires de la famille expulsée du 33 rue Romain Rolland s'est constitué après cette manifestation et a notamment dénoncé dans un communiqué (ici relayé par Indymedia) des propos et gestes ouvertement racistes de la part des riverains, évoquant même des saluts nazis. Des agissements confirmés par d'autres sources.
La vidéo tournée à l'occasion de cette manifestation improvisée lui a donné un certain retentissement local, mais d'autres incidents similaires entre riverains et Roms nous ont été reportés, à Eybens ou encore à La Tronche.
« Nous avons obtenu des moyens »
Signe que la question du logement des familles roms dans l'agglomération est loin d'avoir trouvé sa réponse depuis le démantèlement du camp d'Esmonin, le 29 juillet dernier, la famille expulsée de Saint-Martin-d'Hères faisait partie des occupants de ce campement.
Le “feuilleton” du camp d'Esmonin et l'annonce de son démantèlement avait fortement intéressé les médias. Mais sa suite et ses conséquences semble avoir nettement moins eu les honneurs de la presse depuis la rentrée. Quid notamment des suites données à la lettre qu'Éric Piolle, maire de Grenoble, a adressée au Président de la République pour demander à l'État de prendre ses responsabilités en matière d'hébergement des personnes ?
Alain Denoyelle, adjoint à l'action sociale de la ville de Grenoble, estime que l'État a répondu, dans une certaine mesure, à cette interpellation :
« Quand nous avons lancé l'évacuation, nous avons obtenu des moyens qui n'ont pas forcément toujours été mis en place dans d'autres situations de campements où, en dehors de quelques nuits d'hôtel, il n'y avait pas d'engagements de suivi derrière. »
Ainsi, après un recensement des individus susceptibles d'être pris en charge, l'État s'est engagé à héberger 88 personnes. Auxquelles s'ajoutent les 50 personnes prises en charge par les services de la mairie et actuellement hébergées sur le site du Rondeau.
Enfin, la municipalité a fait bénéficier, pendant quelques semaines, 59 autres sans-logis d'un hébergement provisoire dans des chambres d'hôtel.
Des familles envoyées dans le Nord-Isère
Cependant, le compte n'y est pas. Et pour cause : sur les 88 personnes identifiées par l’État pouvant bénéficier de solutions d'hébergement, seules 54 étaient effectivement présentes sur les lieux, le jour du démantèlement. 34 personnes n'ont pas souhaité se manifester malgré les solutions proposées. Se sont-elles signalées ultérieurement, ainsi qu'elles en avaient l'opportunité ? Sur cette question comme sur d'autres, les services de la préfecture n'ont pas donné suite à notre demande d'entretien.
Cédric Gonsaud, chargé de mission pour l'association Roms Action, met en avant les conditions d'hébergement des personnes prises en charge par l'État pour expliquer ces défections : « Il n'y a pas eu que de bonnes expériences. Des familles ont été envoyées dans le Nord-Isère, ce qui n'est pas mal en soi mais où il y a beaucoup moins d'aides auprès de ces personnes ainsi qu'une perte de repères ».
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