FOCUS – Une maison inoccupée située au 51 rue des Eaux Claires, à Grenoble, et appartenant à la mairie a été investie, ce samedi 30 mai, par des militants afin d’y héberger deux familles en situation de précarité. A la demande de la ville de Grenoble, ils ont finalement été expulsés par les forces de l’ordre en début de soirée. Retour sur cet événement qui relance le débat sur l’hébergement d’urgence.
A peine quelques heures après avoir pris possession d’une maison inoccupée du quartier des Eaux Claires à Grenoble, des militants grenoblois ont été expulsés manu militari, à la demande de la mairie.
Menée conjointement par le collectif RESF (Réseau éducation sans frontière), La Patate chaude, le Dal38 et le collectif hébergement logement, cette occupation devait permettre de loger deux familles vivant à la rue et dont des enfants en bas âge sont scolarisés à l’école Pain levé.
Au cours de l’année, le collectif RESF avait interpellé la mairie à plusieurs reprises.
Face à l’absence de solutions proposées et à l’urgence de la situation, la réquisition de cette maison vide a été décidée. « Réseau éducation sans frontière a accompagné ces familles tout au long de l’année et notamment cet hiver dans leurs démarches administratives afin de trouver un logement décent, explique Nathalie du collectif hébergement logement. C’est suite à ce manque de réponse que nous avons décidé de soutenir la réquisition. »
« Les dispositifs d’hébergement sont pleins »
De son côté, Alain Denoyelle, président du CCAS de Grenoble et adjoint à l’action sociale, estime que ces deux familles dépendent de l’État pour la question de l’hébergement et du conseil départemental pour subvenir à leurs besoins et ceux de leurs enfants.
L’élu rappelle aussi que « les dispositifs d’hébergement sont actuellement pleins ». « Le système est saturé, avec une porte d’entrée assez fermée. Même si je ne minimise pas leur situation, le collectif voit ces deux familles alors qu’au CCAS on en voit des centaines d’autres. »
Une expulsion « violente » ?
A la demande de la Ville de Grenoble, Patrick Lapouze, secrétaire général de la préfecture de l’Isère, a ordonné l’expulsion des deux familles, le jour-même. Les forces de l’ordre, qui sont intervenues aux alentours de 18 heures, ont fait preuve d’une « très grande violence », selon le collectif. Elles auraient ainsi fait usage « de gaz lacrymogènes à bout portant, dans les yeux, sur le visage, mais aussi de coups de matraques, coups de pied sur des personnes à terre ou encore coups de chaîne ».
Plusieurs personnes auraient ainsi été blessées. « Nous sommes choqués. Il n’y avait pas eu effraction. Seul le jardin était occupé. La réponse est incroyablement inadaptée et inacceptable », estime le collectif dans un communiqué en date du samedi 30 mai.
Une maison destinée à l’association Roms Action
La maison vide depuis février dernier et louée depuis 1987 par le CCAS de Grenoble au profit d’une association devrait prochainement être mise à disposition de Roms Action, structure de médiation qui intervient auprès du public rom ressortissant de l’Union européenne. Une convention a d’ailleurs été signée ce mardi 2 juin. « Nous n’avons rien contre cette association ni contre le fait qu’elle ait besoin de locaux pour son activité », tient toutefois à préciser le collectif dans ce même communiqué.
Ce dernier estime également « que la mairie rate ici l’opportunité de s’appuyer sur une dynamique citoyenne alors qu’elle a été élue sur un programme défendant ce principe ».
Faute de proposition d’hébergement, les deux familles sont aujourd’hui retournées vivre dans la rue. « Nous espérons que le CCAS de Grenoble va débloquer la situation. Il faut savoir que beaucoup de logements sur l’agglomération sont vides », rappelle Nathalie du collectif hébergement logement. De son côté, Alain Denoyelle assure que la CCAS recevra prochainement les militants de RESF, même si aucune date n’a été fixée à ce jour.
Maïlys Medjadj