FOCUS – Les sportifs : on ne voit qu’eux, il n’y en a que pour eux ! Sur les écrans, partout dans les médias… A la tête des clubs et fédérations, c’est encore la gent masculine qui est omniprésente. Ce samedi 24 janvier 2015, les sportives prennent une petite revanche, avec la deuxième édition des 24 heures du sport féminin. Rendez-vous à toutes et tous au parc Paul Mistral pour un mouvement chorégraphique exceptionnel !
Il y avait la journée de la femme, le 8 mars. Il y a désormais la journée “de la femme qui fait du sport”, avec les 24 heures du sport féminin organisés ce samedi 24 janvier 2015.
A Grenoble, rendez-vous est donné à tous les sportifs – hommes, femmes, jeunes, seniors, professionnels et amateurs – dès 14 heures devant la vasque olympique du parc Paul Mistral. Au programme : entraînement et échauffement, en vue du mouvement chorégraphique (“flashmob”) prévu à 15 heures. Pour les plus inquiets ou les plus consciencieux, la chorégraphie est dès à présent disponible sur le site www.femixsports.fr.
Situation cocasse, mais surtout preuve d’un grand besoin de reconnaissance chez les sportives. Le sport féminin a en effet soif de visibilité, dans un secteur monopolisé, à tous les niveaux, par les mâles. A quelques exceptions près, comme le twirling bâton… Petit tour d’horizon avec, pour une fois, les championnes à l’honneur.
10 % de sport féminin sur les écrans
En mars 2013, le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) rendait publique une étude sur la visibilité du sport féminin dans les retransmissions sportives diffusées à la télévision, qu’elles soient gratuites ou payantes. Constat sans appel : un déficit de visibilité majeur pour les filles, avec 90 % de sport masculin retransmis, contre 10 % de sport féminin.
Pas de chance pour les filles qui seraient notamment sous-exposées, du fait qu’elles pratiquent des sports moins grand public…
70 % des Français plébiscitent le sport féminin
Qu’on ne nous dise pas que la gent féminine ne fait pas d’audience ! Aux JO de Londres, en 2012, 50 % des meilleures audiences ont été recueillies par les sportives féminines. Par ailleurs, 70 % des Français de plus de 18 ans déclarent trouver le sport féminin aussi intéressant que le sport masculin, selon une étude parue en juin 2013 sur Les idées reçues sur le sport féminin d’Havas Sports @ Entertainment. 64 % des personnes interviewées déclaraient qu’elles regarderaient volontiers le sport féminin… s’il y en avait à la télévision. Les institutions et les médias seraient-ils donc plus frileux, pour ne pas dire plus machistes, que les citoyens ?
37 % de licenciéEs… seulement
« La féminisation du sport est plus complexe à appréhender que par le seul prisme de la diffusion télévisuelle » note le rapport du CSA. En effet, il suffit de considérer les chiffres de la base. Les sportives ne représentent que 37 % des licenciés sportifs en France. Bizarre… Les femmes sont pourtant aussi nombreuses que les hommes sur cette planète.
« Il y aurait un décrochage de la pratique sportive des filles vers 11 – 12 ans » indique Sylvie Druhlon, l’une des organisatrices de la Flashmob, ancienne directrice de l’Office municipal des sports de Grenoble et adjointe aux Sports durant le mandat précédent. Ce décrochage interroge. Cela veut-il dire qu’à l’entrée du collège les filles seraient gentiment (et inconsciemment) incitées à quitter la piste, tandis que les garçons pourraient continuer à s’épanouir dans le sport ?
La rencontre, l’ouverture aux autres
Autre frein à la pratique sportive : le voile porté par certaines Musulmanes. Faudrait-il que les clubs organisent des séances spécifiques pour les femmes sportives voilées ? Question, très polémique, qui ne doit faire pas oublier les objectifs du sport : « au-delà du plaisir du jeu et des enjeux de santé comme la lutte contre l’obésité, le sport c’est la rencontre, l’ouverture aux autres » rappelle Sylvie Druhlon.
Oh hisse, les fédérations !
A l’instar de certaines professions, des disciplines sportives semblent la chasse gardée des garçons. Faut-il aller jusqu’à mettre en place des quotas de filles dans les clubs ? Peut-être pas… Car les fédérations sont encore loin d’avoir fait le maximum pour les attirer.
Entre 2008 et 2012, les disciplines “voile”, “rugby à XIII” et “pêche à la mouche” sont les sports et loisirs qui ont enregistré les plus fortes progressions en matière de licenciées, selon le ministère. Et ce n’est pas renversant : la voile est passée, par exemple, de 21 % à 33 % d’adeptes.
Le bât blesse quand on sait que chaque fédération signe un contrat d’objectifs avec le ministère des Sports afin de mettre en place des opérations spécifiques pour les filles. « Et ces sommes ne sont pas négligeables » pointe Sylvie Druhlon. Enfin, les collectivités et les sponsors ont aussi un rôle à jouer, en conditionnant leurs soutiens financiers et logistiques à une réelle volonté de mixité.
Encadrement sportif : trop peu de femmes
Autre problème structurel : la place ridicule laissée aux femmes dans les équipes d’encadrement, que ce soit dans les instances dirigeantes des fédérations, les ligues ou les sociétés sportives professionnelles.
Sur 115 fédérations de sports – dont 31 olympiques, 60 non olympiques et 24 multisports – on compte à peine 14 présidentes de fédérations, 15 femmes trésorières et 25 secrétaires générales. Et sur 1 600 postes de cadres techniques (entraîneurs, conseillers techniques), seulement 7 % de femmes. Il coule de source que l’encadrement n’étant pas l’image de la société, les filles sont moins enclines à pousser la porte de certains clubs.
Haut les cœurs !
Profitons de cette journée – organisée par le Comité régional olympique et sportif, le comité départemental olympique et sportif et Femixsport – pour rappeler que le sport féminin est très bien représenté à Grenoble, en Isère et en Rhône-Alpes, avec des championnes dans de très nombreuses disciplines : ski, foot, aviron, escrime, rugby, gymnastique, badminton, etc.
Reines d’un jour ?
Séverine Cattiaux