La fina­lité du Yoga

La fina­lité du Yoga

Pratiquer Yoga, c’est faire l’expérience de soi. Le pra­ti­quant est tout à la fois l’expérimentateur et l’objet expé­ri­menté, tant dans le corps que le men­tal ou bien encore dans l’émotionnel. Dans sa fina­lité, le Yoga per­met de se voir, de se com­prendre… voire de s’aimer. Ce qui, vous en convien­drez, requiert par­fois une cer­taine dose de cou­rage. Car il serait plus facile de fer­mer les yeux que de voir son image dans le miroir du tapis !
La pos­ture corporelle
C’est le début, la base de toute pra­tique. Espace de trans­for­ma­tion (éti­re­ment, relaxa­tion, ren­for­ce­ment, etc.), c’est aussi et sur­tout un lieu d’é­coute de ce que dit le corps. Un espace d’ob­ser­va­tion du corps tel qu’il est et non pas du corps tel que je le pense. Point besoin d’être souple pour com­men­cer le Yoga. Il n’y a pas de but à atteindre. Ce n’est jamais une com­pé­ti­tion, ni une pra­tique élitiste.
BlogAndreAlors pour­quoi pra­ti­quer ? C’est parce que le corps parle pen­dant la pos­ture et que le lan­gage du corps est dix fois plus acces­sible, plus facile à com­prendre que le lan­gage de l’intellect. Le corps ne triche jamais, ni avec les mots, ni avec les maux. Encore faut-il prendre le temps de voir et de ressentir.
Le yoga s’adapte à toutes les per­sonnes, à toutes les situa­tions de vie. La santé ou la sou­plesse du corps n’est pas un requis préa­lable, car ce n’est pas la qua­lité de la pos­ture qui compte, c’est la qua­lité de conscience de la pos­ture. Ce n’est pas réus­sir une pos­ture qui m’in­té­resse, c’est l’a­voir éprou­vée (être passé par l’é­preuve), et puis savoir ou ça coince, et au contraire savoir ou ça coule.
Je n’entends le frigo que lorsqu’il s’ar­rête. Je ne vois l’autre que quand il est parti. Le Yoga est fait pour que nous enten­dions tota­le­ment la Vie avant qu’elle ne s’ar­rête. Les orien­taux nomment cet état d’écoute totale : l’é­veil. Le Yoga l’appelle : le Samadhi.
Un contre-sens cou­ram­ment répandu
A lire la presse grand public, il y aurait des pra­tiques ou des tech­niques qui per­met­traient de se pro­té­ger des choses désa­gréables de la vie. Parmi d’autres, le Yoga en serait un exemple. Ce n’est pas mon expé­rience. Il est men­son­ger de pro­mettre une vie sans mala­die, sans souf­france, une béate zéni­tude en assise sur un petit nuage. Ce sont des inten­tions de publi­cistes et donc des pro­pos mani­pu­la­teurs. Ce sont les mêmes logiques publi­cistes qui vous vendent le foie gras à Noel et la cure amin­cis­sante en janvier.
Méfiez-vous des pro­messes mira­cu­leuses dans le domaine de la santé. L’homme est une entité en voie de déve­lop­pe­ment, minus­cule orga­nisme dans le cos­mos, extrê­me­ment démuni et vul­né­rable. Le Yoga n’est pas une thé­ra­pie, mais un for­mi­dable accom­pa­gna­teur, ampli­fi­ca­teur de thérapies.
BlogAndre5Certes le bien-être existe. Chacun de nous l’a déjà ren­con­tré, ici ou là, un jour ou l’autre. Mais ce n’est – heu­reu­se­ment – pas une mar­chan­dise. On ne peut pas l’acheter. Le bien-être est un cadeau de la Vie, une éner­gie à aimer dans le temps pré­sent, un ins­tant certes pré­cieux mais tou­jours éphé­mère. Le désir du bien-être per­ma­nent est tou­jours source de souffrance.
Car la Vie est Une, et elle ne peut pas se cou­per en deux. C’est notre men­tal qui parle en terme duel. La vie dépasse notre lan­gage. Il est impos­sible de la cir­cons­crire entre bien-être et mal-être. Il est vain de ten­ter de la réduire à une pos­ture, une tech­nique, une formule.
Assise, obser­va­tion, immo­bi­lité, méditation
Yoga, c’est agir dans le temps et dans l’espace (asana), puis, par contraste, s’ar­rê­ter d’a­gir. Et là, res­sen­tir, com­pa­rer et regar­der. Yoga, c’est être un moment com­plè­te­ment et inten­sé­ment dans l’action. Puis s’immobiliser, regar­der le théâtre de la Vie et en tirer les leçons. C’est alors le temps de la méditation.
BlogAndre4Méditer, c’est l’op­posé de « avoir tout le temps le nez dans le gui­don ». C’est regar­der l’image de soi sur l’écran de la vie. Si le pro­jec­teur est posé sur une table vibrante, l’image sera conti­nuel­le­ment brouillée, inin­ter­pré­table. Mais s’il est posé sur un sup­port immo­bile, l’image sera claire et faci­le­ment interprétable.
Méditer, c’est poser le men­tal sur un sup­port immo­bile. Méditer, ce n’est pas dor­mir. C’est au contraire être atten­tif, regar­der inten­sé­ment le film, voir que ce n’est qu’un film, sor­tir de la salle et, enfin, s’éveiller à ce qui est. Les savants appellent cela l’état de Conscience.
Et la respiration
Comme la pos­ture, la res­pi­ra­tion relie le monde inté­rieur au monde exté­rieur. Inspirer, expi­rer. Expansion, relaxa­tion. Recevoir, don­ner. Absolument per­sonne ne peut échap­per à cette alter­nance. En tout cas, pas plus de trois minutes.
La res­pi­ra­tion est la seule de nos fonc­tions phy­sio­lo­giques qui peut être acti­vée volon­tai­re­ment ou invo­lon­tai­re­ment. C’est en ce sens qu’elle est un outil d’étude pri­vi­lé­gié en Yoga, un outil tou­jours dis­po­nible, inalié­nable, faci­le­ment com­pré­hen­sible. La res­pi­ra­tion est donc un de nos plus grands professeurs.
Pratiquer pour apprendre, se connaître, se responsabiliser
La pra­tique régu­lière du Yoga nous amène donc à la conscience du corps, de l’esprit, des émo­tions. Sans cette conscience, nous sommes un robot, une marion­nette. Et non pas un acteur de la vie.
Le Yoga cible la ques­tion de la conscience. La ques­tion du « qui m’agite ? » Qui ou quoi me mani­pule et empêche mon libre arbitre ? Qui ou quoi me met en marche ? Qui ou quoi est le pilote dans l’avion ? Qui en est le vrai maître ? Qui sont mes vrais maîtres ? De qui ou de quoi est-ce que « je » dépends dans ma vie ?
BlogAndre3Parmi les maîtres qui m’apprennent la vie, ce peuvent être l’extase, le plai­sir, la souf­france, la mala­die, la pesan­teur ter­restre, l’écoulement du temps, la filia­tion, la créa­tion artis­tique, l’émotion, la vieillesse, la mort, etc.
Le Yoga nous apprend à éta­blir avec tous ces maîtres une rela­tion d’ap­pren­tis­sage du genre « maître à dis­ciple » et non pas une rela­tion de dépen­dance du type « maître à esclave » . Cela s’appelle la liberté !
Pratiquer Yoga, c’est accep­ter de se mettre régu­liè­re­ment et volon­tai­re­ment dans une situa­tion d’ap­pren­tis­sage, c’est s’en­traî­ner à se voir, à voir l’autre, la nature, l’univers. C’est accep­ter d’ouvrir les yeux et enfin ces­ser de « fuir » ce qui fait peur pour, enfin, réus­sir à sou­te­nir l’insoutenable.
Finalement
BlogAndre7Après tout, cha­cun son des­tin ! Chacun est libre de par­tir dans son ate­lier per­son­nel, de déri­ver sur son fleuve mythique, de sau­ver le monde de la haine ou de la mal­nu­tri­tion, de construire des usines ou des cathé­drales, de s’as­seoir en lotus et de médi­ter pen­dant des mois. Il n’y a rien de mal à vous mobi­li­ser dans la quête du mode de vie qui vous convient le mieux.
Car, quoi qu’il en soit, la vie vous fera pas­ser par toutes les cou­leurs de l’arc-en-ciel. Alors, pour cette ren­trée, Yoga ou pas Yoga ? La réponse est ter­rible et magni­fique : peu importe !
André Weill
Un che­min du Yoga
Un homme curieux pénètre pour la pre­mière fois dans une salle de yoga et ques­tionne le professeur.
« Si je com­mence à pra­ti­quer le yoga, quel fruits vais-je en reti­rer ? » lui demande-t-il.
« Tous les fruits aux­quels votre cœur aspire depuis long­temps ! » lui répond le pro­fes­seur. Et, en lui ten­dant un petit car­net, il l’invite à noter les béné­fices les plus incroyables qu’il sou­haite obtenir.
BlogAndre2L’homme, agréa­ble­ment sur­pris de cette pro­po­si­tion, prend le car­net et note avec enthou­siasme ses vœux les plus chers : « Je désire trou­ver ici la séré­nité, le calme et la paix. Je désire trou­ver ici l’amour, la santé, la sagesse. Et puis aussi la gué­ri­son de mes addic­tions. La libé­ra­tion de mes peurs. Une vraie vie d’homme, pleine et entière, lumi­neuse, sans men­songe ni tra­hi­son. Sans guerre, sans vio­lence, sans tsunami. »
Les yeux un peu gon­flés, l’homme sent son corps se détendre, sa poi­trine s’ouvrir et res­pi­rer libre­ment. Il sent son cœur battre. Dans le temps silen­cieux qui suit, il per­çoit une cha­leur incon­nue l’envahir. Derrière ses yeux fer­més, filtre la douce lumière de l’espoir.
Avec émo­tion, il veut rendre le petit car­net au pro­fes­seur, mais se ravise et reprend l’écriture : « Tout ça, je ne le veux pas juste pour moi. Mais aussi pour ma femme, mes enfants, ma famille, mes amis… Et, pour­quoi pas, aussi pour mes enne­mis. Pour tous les copains du bou­lot, pour tout le monde dans mon quar­tier. Pour tous les Grenoblois, pour tous les Français. Et même pour les étran­gers. Partout en Europe, en Afrique, en Asie… Au Nord comme au Sud, sur la terre entière, dans tout le ciel, dans tout l’univers. »
Le pro­fes­seur se régale silen­cieu­se­ment et, modes­te­ment, remer­cie le ciel de lui avoir envoyé un élève si motivé.
Puis il conclut l’entretien : « Il faut néan­moins que je vous pré­cise une chose. Ici, dans la salle de yoga, ne se trouve aucun des fruits mer­veilleux que vous cher­chez. Ici, vous trou­ve­rez les semences, l’eau, un arro­soir et quelques outils de jar­di­nage. Et une carte. Chaque semaine vous appren­drez à vous ser­vir des outils et à lire la carte. Et puis, un jour, de manière impré­vi­sible, vous décou­vri­rez le che­min qui vous emmè­nera jusqu’à votre verger. »
André Weill

A. Weill

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