Série travail de nuit avec portfolio sur Place Gre'net : aide-soignante au CHU de Grenoble dans le service gériatrie

Série tra­vail de nuit : aide-soi­gnante au CHU

Série tra­vail de nuit : aide-soi­gnante au CHU

REPORTAGE – Policiers, urgen­tistes, trans­por­teurs, veilleurs de nuit… Ils sont nom­breux à tra­vailler alors que les autres dorment. Découvrez leur quo­ti­dien et par­tez en immer­sion dans cet uni­vers paral­lèle, à tra­vers une série de por­traits-repor­tages accom­pa­gnés de port­fo­lios. Quatrième de cette série, Ludivine Malézieux, aide-soi­gnante au centre hos­pi­ta­lier uni­ver­si­taire (CHU) de Grenoble.

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© Véronique Serre / pla​ce​gre​net​.fr

20h00, Ludivine quitte La Buisse où elle habite. Direction le CHU. Une demi-heure plus tard, elle arrive sur place, se change, puis va à la ren­contre de ses col­lègues de jour. « Je com­mence à 21h mais je pré­fère arri­ver plus tôt », explique-t-elle. Elle arrive ainsi tou­jours en avance pour ne pas rater ce « rituel ». « On dis­cute, on prend le café. J’aime bien ce moment-là car, étant de nuit désor­mais, je ne tra­vaille plus en équipe, juste en binôme avec une infir­mière. Cela me per­met de gar­der le contact avec mes autres col­lègues. »
Les dis­cus­sions tournent à 90% autour des patients. Les trans­mis­sions d’in­for­ma­tions com­mencent à 21h10 pour se ter­mi­ner à 22h. Ce lundi de novembre, Ludivine attaque une semaine de cinq nuits. Elle tra­vaille au CHU de Grenoble depuis dix ans, dont un peu plus de deux comme aide-soi­gnante au sein de l’Unité méde­cine aigüe géria­trique et éva­lua­tion. Avant d’arriver dans la région, elle a tra­vaillé quatre ans comme agent de ser­vice hos­pi­ta­lier dans une mai­son de santé en Picardie, d’où elle est originaire.
Cinq nuits par semaine
Âgée de 35 ans, Ludivine tra­vaille uni­que­ment de nuit depuis un an, en alter­nant une semaine avec cinq nuits et une autre avec deux nuits. « J’ai com­mencé quand une col­lègue s’est bles­sée et que j’ai pris son rou­le­ment de nuit. Cela m’arrange car je peux plus faci­le­ment m’occuper de ma fille de 8 ans, l’emmener à l’école le matin, la rame­ner, m’occuper de ses devoirs… J’ai l’impression d’être plus pré­sente pour elle. » Sans ces obli­ga­tions fami­liales, Ludivine pré­fè­re­rait tra­vailler de jour, « pour l’aspect rela­tion­nel, avec les patients et les col­lègues. En jour­née, il y a plus de contacts avec les patients qui sont réveillés, bougent et parlent. »

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© Véronique Serre / pla​ce​gre​net​.fr

22h30. Commence la pré­pa­ra­tion des bilans san­guins, avec un pre­mier tour de tous les patients. Au total, pas moins de 26 lits à gérer. Ludivine véri­fie les posi­tions d’en­dor­mis­se­ment et les pro­tec­tions, ras­sure les per­sonnes anxieuses et éteint les lumières. 23H30. Elle s’ap­prête à man­ger un peu. Mais déjà une son­nette reten­tit et il lui faut se rendre dans la chambre du patient. Rien de grave. L’aide-soi­gnante com­mence alors à pré­pa­rer les pres­crip­tions médi­ca­men­teuses : médi­ca­ments injec­tables et com­pri­més pour les soi­gnants du matin. 1h00 : deuxième son­nette. Fausse alerte.
Rassurer et réconforter
2h00 : Ludivine s’as­sure avec l’in­fir­mière que tous les patients dorment. « La nuit, tu ne tra­vailles qu’avec un col­lègue, alors les rela­tions sont plus intimes. Tout le monde dort, il n’y a pas de familles, ni de méde­cins. Nous sommes seules dans le ser­vice. J’apprécie beau­coup ce lien car il est syno­nyme de soli­da­rité et de com­plé­men­ta­rité. » Ludivine répond, au besoin, à l’anxiété noc­turne. Attentive, elle sait ras­su­rer et récon­for­ter même si la fatigue se fait sentir.

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© Véronique Serre / pla​ce​gre​net​.fr

« A 2h ou 3h du mat, j’ai le coup de barre. Donc si je peux, j’essaye de me poser, d’allonger un peu mes jambes, de fer­mer les yeux… Ne pas pou­voir les fer­mer de la nuit, c’est dur. Alors le faire ne serait-ce que quelques minutes, ça fait du bien ! » Pour Ludivine, les nuits se suivent mais ne se res­semblent pas. « Certaines sont si calmes que j’en viens à espé­rer une son­nette ! Je me fatigue plus car elles paraissent plus longues. Par contre, d’autres nuits, je ne touche pas terre et, là, ça passe vite. »
4h50 : troi­sième son­nette. Ludivine vient au che­vet du malade. Toujours. Puis débute le deuxième tour, à 5h00. « C’est le plus dur ! » La fatigue est là et il faut chan­ger les pro­tec­tions uri­naires de la majo­rité des patients, ce qui demande un grand nombre de mani­pu­la­tions phy­siques. « C’est lourd 26 patients à trai­ter quand tu n’as pas dormi de la nuit ! Et c’est aussi à cette heure-là que l’on découvre les per­sonnes décédées… »

Certaines situa­tions sont ainsi lourdes à gérer et à digé­rer. Notamment lors­qu’il s’a­git de gérer un décès qui n’est pas attendu, ou la souf­france d’un patient. D’une minute à l’autre, les deux femmes peuvent être ame­nées à gérer une situa­tion d’urgence vitale. La parole reste alors un moyen d’exor­ci­ser, d’où le besoin fon­da­men­tal de se retrou­ver ensuite entre soignants.
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« J’entends mon lit »
6h20 : le tour du ser­vice est ter­miné. Après avoir effec­tué les trans­mis­sions pour l’équipe du matin, Ludivine finit son ser­vice à 7H15. Cette nuit-là, il y a eu seule­ment cinq son­nettes. Une nuit par­ti­cu­liè­re­ment calme donc. Et elle « entend » main­te­nant son lit. Mais la jour­née est loin d’être finie. Elle doit en effet récu­pé­rer sa fille chez son père pour l’emmener à l’école. « Ensuite, je rentre chez moi, je m’occupe de mon chat, je prend une douche et je me couche vers 9h. Sans déjeu­ner, parce que bien sou­vent je gri­gnote la nuit. Je m’endors alors tout de suite et me réveille vers 11h ou 12h. » Bien trop peu pour Ludivine, qui confie qu’elle se force à se ren­dor­mir jusqu’à 14h30-15h. « Je suis bien consciente que six heures de som­meil, ce n’est pas suf­fi­sant, même si je ne suis pas une grosse dor­meuse. En fait je suis fati­guée mais je n’ai pas som­meil. »

A son réveil, elle prend son « petit déj’ » (sic!), se lave et file cher­cher sa fille qui sort de l’école à 15h45. Commence alors sa deuxième jour­née : goû­ter, aide aux devoirs, ménage, les­sive… Enfin, vers 18h, elle conduit sa fille chez son père, pour ne « pas la lais­ser seule » quand elle part tra­vailler. « Ma fille ne com­prend pas que j’aille tra­vailler quand il fait noir ! »
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© Véronique Serre / pla​ce​gre​net​.fr

« L’hiver, je ne vois pas le jour »
Ludivine recon­naît le côté éprou­vant du tra­vail de nuit. « Des fois, c’est dur. Surtout l’hi­ver : quand tu pars au bou­lot, il fait nuit, et quand tu rentres, il fait tou­jours nuit. Je ne vois pas le jour et ça c’est ter­rible ! Sans comp­ter qu’il faut encore sou­vent dénei­ger et dégi­vrer la voi­ture. Avec dix heures de tra­vail dans les jambes, c’est dur ! »
Travailler la nuit a quelque peu modi­fié ses rela­tions fami­liales. « Par exemple, ma famille qui est dans le Nord ne sait pas quand me télé­pho­ner. Mes proches n’osent pas m’appeler en jour­née. » Travailler de nuit ne change en revanche pas grand chose à sa vie sociale et elle y trouve même son compte. « C’est pareil que si je tra­vaillais de jour. Les plan­nings sont aussi contrai­gnants : en com­men­çant à 7h du mat, tu ne fais pas trop la fête la veille, et en finis­sant à 21h30, voire 22h, tu n’arrives que pour le des­sert. Finalement, pour moi, c’est même mieux car j’ai plus de jours de repos. » Et si elle tra­vaille les dimanches et les jours de fêtes, elle ne s’en for­ma­lise pas : « C’est le lot de tous les soi­gnants ! »
Muriel Beaudoing
Photos et port­fo­lio (ci-des­sous) : Véronique Serre
Passez le cur­seur sur la photo ci-des­sous et cli­quez sur la flèche cen­trale en haut de l’image pour démar­rer le portfolio :
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