ENQUÊTE - En rachetant pour huit millions d’euros le siège de la caisse régionale du Crédit agricole, la ville de Grenoble a-t-elle fait une mauvaise opération ? Commis des irrégularités ? Alors qu'une plainte a été déposée sur le bureau du procureur de la République de Grenoble, et que les oppositions municipales mettent en parallèle ce choix avec celui d'imposer un plan d'économies de 14 millions d'euros, la municipalité entend se projeter à plus long terme. Objectif affiché ? Rationaliser son foncier et faire le ménage dans un patrimoine vieillissant, voire insalubre, dispersé aux quatre coins de la ville. A tort ?
Le rachat par la Ville de Grenoble du bâtiment qu’occupe la caisse régionale du Crédit agricole cache-t-il quelque chose ? Depuis le 31 décembre 2015, la Ville est en effet propriétaire de l’immeuble de la rue Paul-Claudel dans le quartier Malherbe, après une transaction de 8 millions d’euros.
Objectif affiché : y regrouper, à terme, plusieurs services municipaux et entre 550 et 600 agents. Une sorte d’hôtel de ville bis. Mais à quel prix ? Et au bénéfice de qui ? Quels sont les termes de l'accord passé entre la municipalité grenobloise et le Crédit agricole ? Et, surtout, celui-ci se fait-il au détriment du contribuable grenoblois ?
Signalement au procureur de la République de Grenoble
Depuis le 10 novembre 2016, le dossier est sur le bureau du procureur de la République de Grenoble. Derrière la plainte ? Le groupe d’analyse métropolitain (Gam), ce groupe de citoyens qui, depuis des mois, met sans relâche son nez dans les affaires de la Ville. Du Gam, on ne connaît que le porte-parole, Pascal Clérotte. Seul membre à s’afficher publiquement, il laisse les autres œuvrer dans l’ombre. Et ainsi planer le doute sur les intentions de ce groupe de pression, avec le risque d’une instrumentalisation politique.
Qui se cache derrière ce sigle, clin d’œil aux groupes d’action municipale nés à Grenoble sous Dubedout ? On ne le sait toujours pas. Que veut le Gam ? « On fait des analyses et on agit au nom de l’intérêt général », répète Pascal Clérotte. Tous ceux qui veulent s’en saisir peuvent le faire. On n’est pas là pour en tirer un bénéfice. »
Pour ce qui est du dossier du Crédit agricole, peu s’en sont saisis. A peine quelques élus de l’opposition s’interrogent-ils sur ce choix politique, voire sur la précipitation avec laquelle a été bouclée l’opération. Depuis 2015, la Ville est donc propriétaire pour 8 millions d’euros de 12 000 m2 de bureaux avec parking, dans le quartier Malherbe, face à la MC2.
Face à un parc vieillissant et éclaté, la précédente municipalité avait déjà engagé une réflexion pour revoir la cartographie immobilière de la ville et cibler un équipement central.
Transaction bouclée en moins d'un an
« Trouver le lieu et penser à vendre nos biens, là, c’était plus compliqué », fait remarquer Marie-Josée Salat, aujourd’hui conseillère municipale d’opposition (PS). « On avait notamment ciblé ce bâtiment du Crédit agricole. Le souci était de caler le phasage entre la vente de nos biens et l’achat… »
L’actuelle municipalité rouge et verte est-elle allée trop vite ? La rapidité avec laquelle elle a réalisé la transaction interroge* : il s'est passé moins d'un an entre les négociations et la signature de la vente, et ce alors qu'elle lançait quasiment concomitamment un plan d’économies de 14 millions d’euros. Car la Ville ne jouira pas du bâtiment avant 2018, du fait des travaux actuellement en cours au nouveau siège du Crédit agricole sur la Presqu’île, face au pont d’Oxford.
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