FOCUS – Fresque contre la sérophobie, « tram capote »… Les élus grenoblois, en lien avec de nombreuses associations et le SMTC, ont tenu à signifier leur engagement au sein de la journée mondiale de lutte contre le Sida, et leur solidarité à l’égard des campagnes de prévention ou d’information sur la maladie.
« On ne va pas vaincre le Sida en allumant des cierges ! » Telle est la profession de foi d’Emmanuel Carroz, adjoint à la ville de Grenoble en charge de l’Égalité des droits et de la vie associative.
En cette journée mondiale de lutte contre le VIH, le message porté par la municipalité se veut clair : « Notre rôle en tant qu’élus, c’est de permettre que l’information aille vers les gens. Il faut aller vers les personnes peut-être plus éloignées des soins ou des campagnes de prévention. On vaincra le Sida en parlant de fellation, de sodomie… Il ne faut pas avoir honte de sa vie sexuelle, mais il faut savoir se protéger, protéger ceux que l’on aime ou que l’on rencontre », insiste ainsi Emmanuel Carroz.
Pour mieux permettre à l’information de circuler, dans tous les sens du terme, un « tram capote » sillonne les voies du réseau Tag. D’un blanc crème orné de préservatifs de toutes les couleurs, celui-ci affiche différents slogans parmi lesquels, le plus voyant et le plus ambitieux : « Objectif zéro Sida ».
Une opération en lien avec le SMTC, la Semitag, ou encore l’association Aides, Sida info service, le planning familial et de nombreux autres acteurs de la prévention et de l’accompagnement.
Des préservatifs distribués dans le tram
C’est la deuxième année que ce tram aux couleurs de la lutte contre le Sida est mis en circulation, avec une nouveauté pour cette édition 2016 : « Avec les associations, explique le président du SMTC Yann Mongaburu, nous avons choisi d’aller encore un peu plus loin en distribuant des préservatifs, ce petit objet fou, si courant, que certains veulent faire reculer dans son usage. » Les préservatifs seront ainsi distribués à l’intérieur du tram mais aussi sur le marché de Noël.
Yann Mongaburu ne manquera pas au passage de fustiger certaines attitudes « réactionnaires ». Notamment chez les maires qui ont fait interdire la campagne de prévention du VIH organisée par le ministère de la Santé, au motif que celle-ci représentait des couples homosexuels. « Un relent homophobe grave et condamnable », juge Emmanuel Carroz.
Le président du SMTC note pour sa part qu’aucun édile de l’agglomération grenobloise n’a demandé cette censure. « Nous sommes dans un territoire engagé contre les discriminations et pour la santé publique », affirme-t-il.
Et les élus grenoblois de signifier également leur soutien à la campagne d’Aides, dont les photographies – magnifiques – de Matthieu César se veulent encore plus explicites, et ont même valu à l’association de voir sa page Facebook censurée quelques heures, suite à des plaintes d’internautes. Une campagne qui ne sera diffusée qu’en ligne mais ne figurera pas dans les lieux publics, après avoir été retoquée par l’ARPP.
« Une désagréable surprise, pour Emmanuel Carroz. Du point de vue de beaucoup, cette campagne d’Aides est tout sauf choquante ! » L’adjoint à l’égalité des droits ironise en outre sur les campagnes de publicité présentant « des femmes nues ou à moitié nues pour vendre des yoghourts » qui, elles, semblent ne choquer personne.
Une fresque de 39 mètres de long
Au « tram capote » s’ajoute, en cette journée du 1er décembre, l’inauguration d’une fresque dédiée à la lutte contre la sérophobie. Éric Piolle en dénouera lui-même le ruban, rouge naturellement, à l’image du symbole de la lutte contre le Sida.
Située boulevard Gambetta, à proximité de la Caserne de Bonne, la fresque de 39 mètres réalisée par le duo d’artistes Ekis et Boye utilise la métaphore de la natation synchronisée pour mieux parler de lutte contre les discriminations.
Les artistes le confient : ils avaient hésité à représenter des militaires, Caserne de Bonne oblige, mais ont finalement jugé la proximité avec la piscine Jean Bron plus inspirante. Plus parlante au plus grand nombre, également.
Un combat de trente ans
« Les représentations continuent de faire des ravages et l’objectif fixé par l’Onu pour les quatre ans qui viennent, c’est de parler des choses tranquillement, pour changer les représentations, et pour que ceux qui se savent malades puissent se soigner correctement », note Éric Piolle à l’occasion de cette inauguration.
Un « combat de plus trente ans », souligne-t-il encore. « Nous sommes engagés et déterminés, élus contre le Sida, dans une période où l’on voit bien qu’aucun combat contre les stigmatisations n’est gagné. C’est notre rôle, notre responsabilité, de porter haut ce débat dans l’espace public, c’est comme cela que l’on change les choses. »
Et le maire de Grenoble n’oubliera pas de tacler au passage le Conseil régional Auvergne – Rhône-Alpes et son « désengagement » dans le Fonds solidarité Sida Afrique, pour lequel la Ville de Grenoble a débloqué lors de son dernier conseil municipal une aide exceptionnelle de 10 000 euros.