EN BREF – À l’occasion du dévoilement de la plaque en hommage aux victimes du 17 octobre 1961, le maire de Grenoble Éric Piolle a prononcé un discours appelant l’État à la reconnaissance de ses « crimes » commis durant la période coloniale, avant de plaider pour une ville « ouverte et solidaire ».
« Grenoble est riche de ces femmes et de ces hommes venus d’Algérie et d’ailleurs, qui ont fait la ville que nous aimons aujourd’hui. » C’est sur ces mots, puis un poème de Kateb Yacine, qu’Éric Piolle, maire de Grenoble, a conclu son discours prononcé lors de la cérémonie de dévoilement de la plaque en hommage aux victimes algériennes de la manifestation du 17 octobre 1961 à Paris, sur la place Edmond Arnaud.
Une cérémonie durant laquelle il a rappelé les circonstances historiques de cette manifestation et sa violente répression. Mais Éric Piolle a également rendu hommage aux personnes l’ayant dénoncé les jours suivants, citant les journaux L’Humanité et Témoignage Chrétien, « les seuls journaux de l’époque à s’indigner contre le pouvoir en place »*, ainsi que la manifestation du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (Mrap) organisée le 18 octobre.
Le maire de Grenoble a également signalé « certains rares hommes politiques [qui] ont aussi tenté de dénoncer les exactions » et les citoyens ayant œuvré « pour ne pas laisser étouffer ce massacre dans l’obscurité coloniale ».
Plaidoyer pour la reconnaissance des crimes de l’État
Mais Eric Piolle a avant tout plaidé pour une reconnaissance par l’État de ses « crimes » liés à la colonisation. « Nous savons que la France a trop longtemps refusé de regarder en face son passé colonial, de reconnaître les crimes qui ont accompagné cette période », a‑t-il déclaré, avant d’estimer que « cet aveuglement a sans doute participé au sentiment de mépris ressenti par de nombreux Français liés à l’Algérie. »
Il juge ainsi que la reconnaissance du massacre du 17 octobre 1961 par François Hollande en 2012 est « un premier pas qui va dans le bon sens ». Une reconnaissance par ailleurs réclamée par le Collectif grenoblois 17 octobre 1961, dont sont membres le Mrap et le Centre d’information inter-peuple, qui manifeste à Grenoble tous les 17 octobre depuis une trentaine d’années.
La « tradition d’accueil » de Grenoble
« Cet attachement à la vérité, je sais qu’il est largement partagé ici à Grenoble. Il est porté par des citoyens pour qui la Liberté, l’Égalité, et la Fraternité ne sont pas des mots creux, des mots vains », a ajouté Éric Piolle. « On ne construit pas une société durable avec du silence et de l’oubli, mais avec de la vérité et avec du respect. »
Le maire de Grenoble terminera son propos par des mots qui résonnent tout particulièrement au sein d’une actualité marquée par la question des “migrants” ou des “réfugiés”, vantant une ville « ouverte et solidaire » et « fière aussi de sa tradition d’accueil, qu’elle veut continuer à porter plus haut que jamais. »
Florent Mathieu
* Le journal Libération de l’époque signalera également la violence de la répression, et des journaux comme France-Soir ou Le Figaro, après avoir dans un premier temps épousé la version officielle du gouvernement, publieront les jours suivants des articles plus critiques sur l’action de la police ou les conditions de détention de certains manifestants. (Source Acrimed).