TROIS QUESTIONS À – Marie-Josée Salat, conseillère d’opposition PS à la Ville de Grenoble, revient sur le recours déposé par son groupe politique contre la hausse du ticket résident et son nouveau système de paiement, enjeu partiel de la votation citoyenne. Pour la vice-présidente à la participation de Grenoble-Alpes Métropole, le concept de « pouvoir d’agir » est illusoire.
Place Gre’net : Cette semaine, les habitants de Grenoble de plus de 16 ans participent à la première votation citoyenne. Votre groupe appelle à voter « oui » à l’abrogation de la délibération qui a entériné la hausse du tarifs du stationnement et demande comme le Cluq une concertation. Vous contestez en particulier la légalité du nouveau système de facturation du ticket résident, basé sur le quotient familial. Vous avez d’ailleurs déposé un recours…
Les pétitionnaires demandent à ce que le maire et la municipalité reviennent sur la délibération de la hausse des tarifs de stationnement… Nous sommes intervenus lors du dernier conseil municipal pour demander la même chose. Que le maire puisse envisager une augmentation des tarifs, on aurait pu le comprendre dans un certain nombre de cas. Le problème de cette délibération est qu’elle augmente de 50 % le tarif classique proposé à tout un chacun et multiplie par trois le tarif résident, qui passe de 12 à 30 euros pour certains résidents.
Pour les ménages qui ont deux véhicules, le tarif de la deuxième voiture passe même de 12 à 40 euros. Ce qui fait que, pour un ménage au-dessus des seuils de quotients familiaux, c’est un peu plus de 500 euros par an de taxes supplémentaires. C’est un impôt déguisé ! Sachant que la mise en place de ces quotients familiaux ne favoriserait finalement que très peu de gens. Sinon, ils [les élus de la majorité, ndlr] ne l’auraient pas fait…
Pourquoi avons-nous déposé un recours auprès du tribunal administratif ? Il faut bien comprendre que le stationnement est un type de service public bien particulier. Ce n’est pas un service public dit “à la tête”, comme l’inscription des enfants à la cantine.
Dans ce cas, pour ne pas pénaliser les enfants des familles nombreuses ou ayant de modestes ressources, on peut en effet introduire un tarif différencié… En revanche, dans le cas du stationnement, il s’agit d’un service public administratif obligatoire. Nombre de Grenobloises et de Grenoblois n’ont pas le choix ou très peu, entre un service public de stationnement payant ou gratuit.
Dans 80 % des cas, ils doivent stationner leur véhicule sur un stationnement payant. Nous avons donc déposé un recours auprès du tribunal administratif en inégalité de cette décision, parce que nous considérons que cette délibération est une entrave au principe de l’égalité d’accès au service public et d’égalité de traitement vis-à-vis du service public, introduisant des tarifs différenciés. Partant du quotient familial, on introduit, de facto, une différence de traitement.
Plus globalement, quel regard portez-vous sur le système de démocratie participative mis en place par l’équipe d’Eric Piolle ?
Je pense que l’ambition des élus grenoblois est une ambition très forte en matière de participation citoyenne, de concertation, de co-construction, puisqu’ils sont extrêmement sensibles à ces questions là… Je les pense sincères […].
Par rapport au budget participatif, notre groupe y est également favorable. Nous considérons que c’est une démarche très intéressante. En 2015, il y a eu 9 projets qui sont en cours de réalisation. Bon très bien…
Après, ce que je constate, c’est que l’ambition est grande, mais que sur un certain nombre de sujets sensibles, il n’y a pas eu de démarche à la hauteur de cette ambition. Et je le regrette en tant que Grenobloise et en tant qu’élue municipale […] Il ne s’agit pas de donner des leçons de morale ou de conduite. Ce n’est pas mon intention car ce sont des sujets difficiles et complexes… Moi, je dis simplement qu’il ne faut pas donner le sentiment que tout est possible, quand peu de choses le sont, finalement […].
Pour revenir à l’augmentation des tarifs de stationnement, la manière de faire est également très problématique… L’équipe municipale a décidé en trois semaines de modifier complètement la politique tarifaire du stationnement payant à Grenoble. La décision a été présentée en commission Ressources trois semaines avant le conseil municipal.
On nous a dit dans cette commission : « Il y a une prochaine délibération qui concerne la tarification du stationnement ».
On a découvert la chose ce jour-là. La délibération a été présentée trois semaines après et, dans ce laps de temps, trois réunions ont été organisées auprès des habitantes et habitants…
Les réunions ont été présentées comme des réunions de concertation. Or en réalité, cela a été trois réunions d’information. Ces réunions ont d’ailleurs été très houleuses, et on connaît la suite… C’est pour cela que, lorsqu’on affiche les règles, il faut qu’elles soient claires. Et dans le cas présent, cela n’a pas été clair…
Vous êtes en charge de la participation citoyenne à la Métropole grenobloise et vous venez de lancer différents dispositifs participatifs dont la plateforme participative… Quelle est sa finalité : donner du pouvoir d’agir ?
On n’a pas repris la terminologie du pouvoir d’agir […] Je n’ai jamais voulu prendre d’engagement que je ne saurais tenir. Je ne dis pas qu’on est dans un processus de démocratie directe. Je ne dis pas qu’on est dans la co-construction, je ne dis pas qu’on offre du pouvoir d’agir. Car ce sont des termes qui peuvent recouvrir des réalités variables.
Et finalement, aujourd’hui, j’ose le dire – peut être que ça n’est pas politiquement correct de le dire ainsi mais je préfère le dire – je pense qu’on n’est pas encore tout à fait à l’aise avec ces concepts-là et on n’est pas en mesure de les assumer pleinement. Donc je préfère sur un projet donné, par exemple, d’intérêt métropolitain ou sur le PLUi (Plan local d’urbanisme intercommunal ou sur Métrocâble que l’on mette en place un processus de consultation et de concertation. Les avis qui s’expriment alors dans le cadre de ces concertations viennent enrichir le projet…. Et généralement cela fonctionne bien.
Séverine Cattiaux