DÉCRYPTAGE – Il ne reste vraiment plus beaucoup de temps aux quatre pétitions citoyennes grenobloises pour atteindre le seuil des 2 000 signatures. Car passé le 26 août prochain prochain il sera trop tard. Et le compte est loin d’y être. Au point de se demander si la première votation citoyenne, prévue en octobre, n’arrive pas un peu trop tôt…
Quatre organisations grenobloises ont lancé une pétition, s’emparant ainsi du nouveau dispositif d’interpellation et de votation d’initiatives mis en place par la Ville de Grenoble. Première étape pour les pétitionnaires : rassembler 2 000 signatures d’ici le 26 août.
Les pétitions, une fois validées, seront examinées lors du conseil municipal du 26 septembre. La Ville décidera alors d’adopter une partie d’entre elles (ou aucune) et soumettra les autres à la votation citoyenne, qui se déroulera du 10 au 15 octobre 2016.
Or, étant donné l’état d’avancement de la collecte des signatures, le temps imparti et le relâchement des pétitionnaires inhérent à la période estivale, il se pourrait bien qu’au final la votation citoyenne ne compte qu’un ou deux participants. Tout est encore jouable, néanmoins. Confiant en la capacité de mobilisation des Grenoblois (même en plein mois d’août), Pascal Clouaire, adjoint de la démocratie locale, se veut confiant : « Nous tablons sur deux ou trois sujets de votation par an. »
Une pétition pour un centre-ville… “apaisé”
Les pétitionnaires ont pourtant eu six mois pour rassembler leurs 2 000 signatures. Alors, quoi ? En fait, si les pétitions peinent à faire le plein, c’est qu’elles ont démarré tard.
Fin mai seulement, l’Union des habitants du centre-ville a lancé la toute première pétition. Son objectif ? Faire interdire la consommation d’alcool dans l’espace public toute l’année, dans le centre-ville.
Au milieu de l’été, les pétitionnaires déclarent, sur l’espace dédié du site de la Ville, avoir recueilli 526 signatures, dont 76 en ligne (à la date du 8 août). Reste encore un delta pour atteindre 2 000 signatures.
Démarrage en trombe de la pétition contre les tarifs de stationnement
Force est de constater que la création du nouveau dispositif d’interpellation n’a pas engendré de déferlement de pétitions, et que les sujets qui semblaient dans l’air (cf. encadré L’opposition dans les starting blocks) – vidéosurveillance, baisse des effectifs de la police municipale, difficultés du commerce en centre-ville – n’ont finalement fait l’objet d’aucune pétition. A contrario, des mesures du plan d’économies annoncées par Eric Piolle ont réveillé les appétits de rébellion.
S’opposant à la hausse des tarifs de stationnement sans concertation, le Comité de Liaison des unions de quartier (Cluq) a alors lancé une pétition le 15 juin dernier. Elle demande ainsi à la Ville d’annuler sa décision d’augmenter les tarifs de stationnement, et d’ouvrir un temps de diagnostic partagé sur ce thème.
Fin juillet, la pétition du Cluq réunissait 1 595 signatures, dont 215 électroniques (à la date du 8 août. Autrement dit, les meilleurs scores parmi les quatre pétitions en cours, et la pétition qui a le plus de chance, a priori, d’aboutir dans les temps. « Le démarrage est bien parti. Nous avons récolté 900 signatures en trois week-ends. Nous étions assez optimistes avant les vacances… », précise Gilles Namur, président du Cluq.
La collecte des signatures semble avoir tranquillement continué à progresser pendant le mois de juillet. Elle devrait poursuivre ce rythme de croisière durant août, garantit Jean-Pierre Charre, vice-président secrétariat et urbanisme du Cluq : « Notre pétition pourrait être parmi les premières à atteindre les 2 000 signatures… Nous sommes en train de discuter avec la Ville des modalités de validation de ces signatures. »
La pétition en faveur de la MDH Bajatière opérationnelle en… 2017
Certes, les quatre premiers pétitionnaires ont l’air à la traîne. Mais il faut dire aussi qu’ils essuient les plâtres : l’outil « dispositif d’interpellation » est en période de rodage et les services l’expérimentent pour la première fois. D’où peut-être certaines lenteurs constatées et lourdes de conséquences. « Le service juridique de la Ville nous a donné l’autorisation de pétitionner… seulement le 14 juillet ! Oui, le 14 juillet, alors que notre demande remonte à fin juin », relate Marc Mallet, trésorier de l’Association des usagers des équipements socioculturels Bajatière (AUESCB), à l’initiative de la pétition. Il assure même « avoir dû, en plus, un peu les bousculer ».
Objet de la pétition : le « maintien de la gestion directe du centre social Bajatière par la Ville de Grenoble ». Dans ce cas également, l’AUESCB demande comme le Cluq, à la Ville de renoncer à l’une de ses 102 mesures inscrites dans son plan d’économies.
Comme l’on sait l’exécutif grenoblois cramponné à son plan d’économies, il ne risque pas de changer d’avis. La votation citoyenne d’octobre 2016 reste ainsi l’unique alternative pour l’association de voir sa requête aboutir.
Avec 47 signatures électroniques et 94 signatures papier (à la date du 29 juillet), force est de constater que la pétition apparaît assez mal partie pour être bouclée à temps. D’autant que le pétitionnaire a l’intention de s’activer à la rentrée. « En septembre, nous allons faire appel à une personne qui connaît bien les réseaux sociaux pour faire plus de buzz. » Au mieux, cette pétition fera donc l’objet d’une votation en… octobre 2017.
La pétition « pour le jardinage autogéré » dans les choux
Une quatrième pétition provient du binôme Nuit debout / Grenoble transition 2016. Son but : demander à la Ville d’autoriser la généralisation de la culture de potagers autogérés, accessibles et gratuits dans l’espace public.
Pour cette pétition également, atteindre les 2 000 signatures d’ici le 26 août semble relever de l’exploit. Fin juillet, la pétition approchait les 500 signatures. Un chiffre à la louche car plusieurs formulaires de pétitions papier sont en circulation « Et seulement 21 signatures électroniques » [à la date du 8 août, ndlr], s’étonne Sylvie, l’une des animatrices de la pétition. « Notre pétition en ligne manque de visibilité », reconnaît-elle.
Ajouté à cela, la trêve estivale ? A vrai dire, là n’est pas tant le problème, répond Sylvie. Il s’avère, en fait, plus difficile que prévu de faire adhérer les gens à l’idée de jardins autogérés. « Les personnes avancent des motifs différents pour ne pas s’engager. J’entends toutes sortes d’arguments ! Les gens ont comme peur. Ou alors ils nous disent que la Ville le fait déjà, etc. » La militante reste malgré tout motivée : « Cette pétition a le mérite d’engager la discussion ! »
Autre obstacle mentionné par Sylvie : le logo de la Ville apposé sur les formulaires papier de la pétition, qui dessert, de temps à autre, les pétitionnaires. Certaines personnes fâchées contre la Ville depuis qu’elle a sorti son plan d’économies, ne veulent rien cautionner qui semble provenir de la mairie, ou être soutenue par cette dernière.
Et après le 26 août ?
Les pétitions qui auront récolté 2 000 voix devront encore passer sous les fourches caudines de la vérification. Le principe étant celui décrit par Pascal Clouaire : « Si dans les cinquante noms vérifiés au hasard, il y en cinq qui ne sont pas valables, alors la pétition sera en principe rejetée. Nous avons toutefois décidé d’élargir la vérification à cinquante nouveaux noms. On ne va pas bloquer pour le plaisir de bloquer. Au contraire, nous voulons le débat public ! »
Le 26 septembre, la Ville se prononcera sur les pétitions valides. Les propositions citoyennes que l’équipe municipale d’Eric Piolle ne veut pas prendre en charge seront soumises à la votation citoyenne et devront, pour être retenues, recueillir 20 000 voix majoritaires en octobre prochain.
Enfin, et surtout, entre le 26 septembre et le 10 octobre, les uns et les autres mèneront leur campagne électorale. « La Ville organisera des débats publics pour exposer tous les points de vue et le sien… », s’engage Pascal Clouaire. Encore faudra-t-il, bien entendu, qu’il y ait matière à débattre.
Séverine Cattiaux