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De gauche à droite, la réalisatrice israélienne Yael Perlov et le réalisateur palestinien Ahmad Bargouthi. © Alexandra Moullec

Festival du film court : ren­contre avec Yael Perlov et Ahmad Bargouthi

Festival du film court : ren­contre avec Yael Perlov et Ahmad Bargouthi

FOCUS – Invités excep­tion­nels du Festival du film court, la réa­li­sa­trice Yael Perlov et le réa­li­sa­teur pales­ti­nien Ahmad Bargouthi étaient éga­le­ment mis à l’hon­neur lors d’une mas­ter class orga­ni­sée le 6 juillet 2016 à la Maison de l’in­ter­na­tio­nal. Objectif : par­ler de leur col­la­bo­ra­tion et de la créa­tion ciné­ma­to­gra­phique en zone de conflit. 

Le Festival du film court en plein air a débuté mardi 5 juillet 2016. Organisé par la Cinémathèque de Grenoble, cet évé­ne­ment inter­na­tio­nal offre chaque année une pro­gram­ma­tion éclec­tique. Pour cette édi­tion, il fait notam­ment la part belle à deux réa­li­sa­teurs : Ahmad Bargouthi, réa­li­sa­teur et pro­duc­teur pales­ti­nien et l’Israélienne Yael Perlov, direc­trice du dépar­te­ment cinéma de l’u­ni­ver­sité de Tel-Aviv. Celle-ci a ini­tié « Coffee, water and sport », trois pro­jets ras­sem­blant au total près d’une ving­taine de courts-métrages israélo-pales­ti­niens. Une mas­ter class était orga­ni­sée mer­credi 6 juillet 2016 à la Maison de l’in­ter­na­tio­nal pour par­ta­ger leur expérience.

Guillaume Poulet, directeur de la Cinémathèque de Grenoble. © Joël Kermabon

Guillaume Poulet, direc­teur de la Cinémathèque de Grenoble. © Joël Kermabon

Guillaume Poulet, direc­teur de la Cinémathèque de Grenoble explique ce qui l’a séduit chez les deux aco­lytes : “J’ai vu leur pro­gramme Sport […] l’année der­nière. Je trou­vais la démarche vrai­ment inté­res­sante. […] Je vou­lais vrai­ment pou­voir pré­sen­ter une par­tie des films, même si c’est dans le cadre de nos pro­gram­ma­tions annexes, en dehors de la sélection.

Et d’a­jou­ter : « Si leur tra­vail est un peu une pierre à l’édifice de la com­pré­hen­sion mutuelle des deux peuples, je vou­lais qu’on ne soit pas juste dans de la consi­dé­ra­tion poli­tique ou géo­po­li­tique mais qu’on reste quand même sur la ques­tion du cinéma. »

Comment faire du cinéma dans des condi­tions com­pli­quées ? Pourquoi avoir ini­tié un pro­jet israélo-pales­ti­nien ? Comment le pro­jet a été reçu en Israël et dans les ter­ri­toires pales­ti­niens ? Autant de ques­tions aux­quelles les réa­li­sa­teurs ont répondu lors de leur mas­ter class. Rencontre.

« ON A OUBLIÉ QUI ÉTAIT ISRAÉLIEN ET QUI ÉTAIT PALESTINIEN »

Place Gre’net : Quelles dif­fi­cul­tés avez-vous ren­con­trées lors des tournages ?

Yael Perlov : C’était la dis­tance entre nous. Je veux dire, au début on ne se connais­sait pas, on ne s’appréciait pas, il n’y avait que de la curio­sité. Et on avait peur l’un de l’autre. C’est vrai­ment le pro­blème psy­cho­lo­gique auquel on a été confrontés.

La réalisatrice israélienne Yael Perlov. © Alexandra Moullec

La réa­li­sa­trice israé­lienne Yael Perlov. © Alexandra Moullec

Dans ma tête, c’é­tait un ter­ro­riste et lui pen­sait que j’étais un sol­dat. Enfin, pas moi mais mon fils peut-être… Ce n’est pas facile de bri­ser ce mur d’ostracisme et de préjugés.

Autre pro­blème : j’ai dû emme­ner toute l’équipe israé­lienne en Palestine à 2 heures du matin, avec les camé­ras. Les camé­ras ne mar­chaient pas. On a prin­ci­pa­le­ment dû faire face à des pro­blèmes tech­niques pour faire en sorte que ça marche. Et ensuite on a oublié qui était israé­lien, qui était pales­ti­nien, on vou­lait juste que ça marche.

Espérez-vous abais­ser des fron­tières, aussi bien phy­siques que psy­cho­lo­giques grâce à votre tra­vail commun ?

Ahmad Bargouthi : On l’a fait d’une cer­taine manière, même si l’effet n’était pas si impres­sion­nant, et on a réussi à plu­sieurs reprises mais, à chaque fois, c’était des petites choses.

De gauche à droite, la réalisatrice israélienne Yael Perlov et le réalisateur palestinien Ahmad Bargouthi. © Alexandra Moullec

De gauche à droite, la réa­li­sa­trice israé­lienne Yael Perlov et le réa­li­sa­teur pales­ti­nien Ahmad Bargouthi. © Alexandra Moullec

Yael Perlov : Mais on pense que l’art peut gué­rir. Ça n’apportera pas de solu­tions poli­tiques mais je pense, on pense, que l’art peut gué­rir cer­taines choses de manière assez effi­cace. Des fois, on oublie, on sait qui on est mais on oublie qu’on est enne­mis éga­le­ment. […] C’est l’histoire de notre vie. Le conflit est pré­sent en per­ma­nence, on ne peut pas l’ignorer mais, quelques fois, il arrive qu’on oublie. Les Israéliens ne savent pas ce qui se passe en Palestine par manque d’informations […] mais les Palestiniens sont très bien infor­més. Ils [les Israéliens, ndlr] ne s’y inté­ressent pas suf­fi­sam­ment. C’est pour ça que j’ai lancé ces pro­jets, pour leur appor­ter des informations.

Vous avez cité le poète pales­ti­nien Mahmoud Darwich lors de votre mas­ter class. Est-il une source d’inspiration ?

Yael Perlov : Pour Coffee oui. Nous avons décidé de mettre une cita­tion de Mahmoud Darwich concer­nant les cof­fee shops [es café-res­tau­rants, ndlr] et le fait que le café fédère les gens. Un des films que nous avons fait pour Coffee se base sur un de ses poèmes : un homme se réveille à Beyrouth, part de sa chambre à cou­cher et rejoint sa cui­sine pour faire le café. Il y a une explo­sion et il écrit un poème sur cet événement ».

« J’ai eu la chance de me rendre sur sa tombe en Palestine, et j’étais très curieuse de la voir car je sais que les auto­ri­tés israé­liennes refusent de l’inhumer en Israël alors qu’il est né dans le nord du pays. Du coup, j’étais très curieuse de voir sa tombe à Ramallah. […] J’aime ses poèmes d’un point de vue artis­tique et pas juste pour leur enga­ge­ment poli­tique. […] On a tous les tous les deux des enfants, et on pense à l’avenir. On ne perd pas espoir, c’est pour­quoi on a lu ce poème : culti­ver de l’espoir. On ne peut pas s’ar­rê­ter d’y croire et on continuera ».

Propos recueillis par Alexandra Moullec

Séance de rat­tra­page dimanche 10 juillet dès 16 h 30 à la salle Juliet Berto avec la redif­fu­sion de six films réa­li­sés dans le cadre des pro­jets Coffee, water, sport dif­fu­sés mardi 5 juillet.

AM

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