Manifestation contre la loi travail El Khomri à Grenoble, 31 mars 2016. © Yuliya Ruzhechka - placegrenet.fr

Soirée du 31 mars : la résis­tance citoyenne dans la fumée des lacrymogènes

Soirée du 31 mars : la résis­tance citoyenne dans la fumée des lacrymogènes

REPORTAGE PHOTO. La mani­fes­ta­tion du 31 mars a sans aucun doute ras­sem­blé le plus grand nombre de per­sonnes depuis le début de la mobi­li­sa­tion citoyenne natio­nale contre le pro­jet de loi El Khomri. Une mani­fes­ta­tion en par­ti­cu­lier mar­quée par de nom­breuses confron­ta­tions entre la police et les mani­fes­tants, jusque tard dans la soi­rée, suite à l’an­nu­la­tion de la pro­jec­tion du film Merci Patron ! à l’an­neau de vitesse.

ManifestationContreLaLoiElKhomri31MarsCreditYuliyaRuzhechka-57

© Yuliya Ruzhechka – www​.pla​ce​gre​net​.fr

Ce n’est qu’une fois arrivé parc Paul Mistral, point de ral­lie­ment de la mani­fes­ta­tion, que la fumée des grillades a rem­placé celle des pétards, fumi­gènes et lacry­mo­gène. Le tout dans une ambiance calme et soli­daire : une assem­blée géné­rale étu­diante d’un côté, des jon­gleurs de l’autre.

Un peu plus loin, un groupe d’é­tu­diants en géo­gra­phie ins­talle un « arbre por­teur de paroles » et se pré­pare à ani­mer un ate­lier de seed bombes, plan­ta­tion de bulles d’ar­gile avec des semences à l’intérieur.

Une ins­tal­la­tion qui res­semble plus à une fes­ti­vité orga­ni­sée par la Ville qu’à une mani­fes­ta­tion de « On en a marre ! », slo­gan régu­liè­re­ment repris depuis la pre­mière mani­fes­ta­tion contre la loi El Khomri.

Passez le cur­seur sur la photo et cli­quez sur la petite flèche en haut au centre pour démar­rer le dia­po­rama et décou­vrir l’am­biance de la jour­née de manifestation.

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« Au moins 200 CRS »

Vers 19 heures, la nuit tombe et, comme dans le conte de Cendrillon, le ras­sem­ble­ment se trans­forme… Et pour cause : la pro­jec­tion du film Merci Patron ! a été annu­lée par la Ville pour rai­son de sécu­rité, et les mani­fes­tants res­tés parc Paul Mistral chas­sés avec des gre­nades lacry­mo­gènes. « Il y avait au moins 200 CRS. Ils ont gazé les mani­fes­tants qui se sont dis­per­sés par la suite », témoigne Pascal, pré­sent sur place.

La police ayant blo­qué l’ac­cès à l’an­neau de vitesse, les mani­fes­tants dis­per­sés décident de par­tir en cor­tège impro­visé. « Ils ne nous ont pas laissé res­ter et occu­per le parc pour faire la pro­jec­tion tran­quille­ment. On va donc occu­per la rue main­te­nant », explique Thomas, qui avoue que le plan d’ac­tion s’im­pro­vise au fur et à mesure de l’a­van­ce­ment du cor­tège. Les groupes de mani­fes­tants se dis­persent alors dans la ville. Plusieurs confron­ta­tions avec la police auront lieu dans la soirée.

Environ 300 per­sonnes rejoignent d’a­bord l’a­ve­nue Alsace-Lorraine, puis le cours Berriat. Vers 21 heures, à Chavant, le groupe décide d’a­van­cer vers l’hôtel de police. « Libérez nos cama­rades ! », réclament-ils, car une dizaine des per­sonnes arrê­tées à l’an­neau de vitesse sont alors en garde à vue.

Manifestation contre la loi travail El Khomri à Grenoble, 31 mars 2016. © Yuliya Ruzhechka - www.placegrenet.fr

Le soir, après l’in­ter­ven­tion bru­tale des forces de l’ordre au parc parc Paul Mistral, cer­tains mani­fes­tants se dirigent vers l’hôtel de police. © Yuliya Ruzhechka – www​.pla​ce​gre​net​.fr

L’hôtel de police étant pro­tégé par un bar­rage des forces de l’ordre, plu­sieurs gre­nades lacry­mo­gènes sont lan­cées pour empê­cher les mani­fes­tants d’a­van­cer. Quelques-uns ripostent avec des bou­teilles en verre, avant de se dis­per­ser, la fumée piquante des gaz lacry­mo­gènes fai­sant son effet.

Manifestation contre la loi travail El Khomri à Grenoble, 31 mars 2016. © Yuliya Ruzhechka - www.placegrenet.fr

Ambiance insur­rec­tion­nelle le soir du 31 mars 2016, à Grenoble. © Yuliya Ruzhechka – www​.pla​ce​gre​net​.fr

« On vou­lait juste regar­der un film ! Et puis la police a com­mencé à char­ger même des per­sonnes assises par terre, vrai­ment au hasard. » Les per­sonnes devant l’hôtel de police échangent leur per­cep­tion de cette jour­née riche en émo­tions et en pro­jec­tiles. Certaines s’in­quiètent du sort de leurs cama­rades et essayent de les joindre sans suc­cès en appe­lant les hôpi­taux et le com­mis­sa­riat. Aucune infor­ma­tion ne fil­trera, tant sur le nombre des mani­fes­tants bles­sés que sur celui des per­sonnes qui pas­se­ront la nuit en garde à vue.

Manifestation contre la loi travail El Khomri à Grenoble, 31 mars 2016. © Yuliya Ruzhechka - www.placegrenet.fr

Une tren­taine des per­sonnes devant l’hôtel de police attendent des nou­velles de dizaine des per­sonnes arrê­tées à l’an­neau de vitesse. © Yuliya Ruzhechka – www​.pla​ce​gre​net​.fr

Un des mani­fes­tants pré­sent du côté de la CGT a été éga­le­ment arrêté. Après une heure d’en­tre­tien avec lui, son avo­cat confirme que son client pas­sera la nuit au com­mis­sa­riat, avec une audi­tion pré­vue le len­de­main matin : « Il ne com­prend vrai­ment pas pour­quoi il s’est fait arrê­ter. »

« Des arres­ta­tions mus­clées », selon la séna­trice Annie David

Sur place, Annie David, séna­trice de l’Isère membre du groupe Communiste répu­bli­cain, citoyen (CRC) qui a par­ti­cipé à la mani­fes­ta­tion le matin même, a fait le dépla­ce­ment. Partie du parc Mistral après les prises de parole, elle a reçu quelques heures après un appel des syn­di­ca­listes lui rap­por­tant des « arres­ta­tions mus­clées » à l’an­neau de vitesse.

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Annie David, séna­trice de l’Isère membre du groupe Communiste répu­bli­cain citoyen. © Yuliya Ruzhechka – www​.pla​ce​gre​net​.fr

En tant que séna­trice par­le­men­taire, elle peut en effet entrer dans tous les lieux de pri­va­tion de liberté, comme par exemple une cel­lule de com­mis­sa­riat. « Il y a eu des arres­ta­tions mus­clées et des jeunes gens mis en garde à vue. C’est pour cela que je suis venue voir ce qui s’é­tait passé ce soir. »

« J’ai pu ren­con­trer tous les jeunes qui ont été arrê­tés, même si je peux juste les voir, leur dire “bon­jour” et leur deman­der si ça va. » De quoi ras­su­rer leurs cama­rades qui les atten­daient dehors, sans nou­velles. Aucune des per­sonnes arrê­tées ren­con­trées par la séna­trice n’a été blessée.

Cette der­nière a son avis sur le dérou­le­ment des évé­ne­ments. « La mani­fes­ta­tion, quand elle est arri­vée à l’hôtel de police, n’é­tait pas vio­lente. Ce sont les forces de l’ordre qui ont lancé des pro­jec­tiles avec des gaz irres­pi­rables et ont couru après des per­sonnes qui se sont dis­per­sées. »

Annie David ne cache ainsi pas son éton­ne­ment : « J’ai dit au patron de l’hôtel de police que ce n’é­tait pas comme ça qu’on pou­vait cal­mer la mani­fes­ta­tion et que si on vou­lait que les choses dégé­nèrent, on fai­sait comme ça. »

Vers 22 h 30, mani­fes­tants et forces de l’ordre se perdent de vue. Seule une ving­taine de per­sonnes res­te­ront sur les marches de l’hôtel de police.

Yuliya Ruzhechka

Passez le cur­seur sur la photo et cli­quez sur la petite flèche en haut au centre pour démar­rer le dia­po­rama sur les suites de la mani­fes­ta­tion du 31 mars.

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Suite aux « vio­lences poli­cières et à la répres­sion mas­sive déployée hier par la pré­fec­ture contre l’i­ni­tia­tive de la nuit debout et la pro­jec­tion du film merci patron », Solidaires Isère pro­pose un ras­sem­ble­ment ce ven­dredi 1er avril, à 18 heures place de la préfecture.

De nou­veaux ras­sem­ble­ments citoyens sont par ailleurs pré­vus les 5 et 9 avril prochains.

YR

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