REPORTAGE VIDÉO – Les produits en date limite de consommation ne sont pas tous jetés dans l’agglomération grenobloise. Un certain nombre d’invendus sont notamment recueillis depuis plusieurs années par la banque alimentaire de l’Isère. Du tri au sein d’un supermarché au don aux associations, en passant par l’entrepôt de stockage à Sassenage, suivez le parcours complet de cette redistribution alternative.
Cent euros par an et par personne. Tel est le coût, en France, du gaspillage alimentaire. Un chiffre encore sous-estimé, selon l’Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (Ademe) qui prend en compte les coûts liés au transport, stockage, préparation et gestion des déchets.
Chaque Français devrait ainsi en réalité s’acquitter de 159 euros en moyenne chaque année pour combler ce gaspillage, présent à tous les niveaux de la chaîne alimentaire. A l’échelle nationale, la perte annuelle est estimée entre 12 et 20 milliards d’euros.
Le grand public incrimine souvent les grandes surfaces alimentaires comme principale cause du gaspillage alimentaire. Pourtant, le rapport du député PS Guillaume Garot, remis au gouvernement le 14 avril dernier, montre que le gaspillage des ménages est de 3 à 5 fois plus élevé que celui de la catégorie “commerce et distribution”. Autre source importante de gaspillage alimentaire, la production agricole, sachant que les marchés sont deux fois moins gaspilleurs que les commerces.
“La ramasse” fonctionne à plein au niveau local
Sur Grenoble, la lutte contre le gaspillage alimentaire existe depuis des années grâce à la banque alimentaire de l’Isère et ses 150 bénévoles. En contact avec plus de 80 associations chaque jour, celle-ci a permis en 2014 la distribution de 240 000 repas, rien que sur le département. Pour y parvenir, la banque alimentaire n’a pas attendu les récents amendements votés au Sénat et à l’Assemblée nationale. Environ 20 % de ses ressources proviennent de “la ramasse”. Une redistribution des produits invendus réalisée chaque matin devant les grandes enseignes de l’agglomération.
Place Gre’net a suivi le parcours des aliments au départ du magasin Carrefour Saint-Égrève, avec cet autre mode de distribution organisé par la banque alimentaire et l’association familiale de Saint-Égrève.
Avec ses 4 salariés, 110 bénévoles et 600 adhérents, l’association familiale de Saint-Égrève est l’une des plus grosses structures du genre à être en partenariat avec la banque alimentaire de l’Isère. C’est elle qui est en contact direct avec les ayants droit – chômeurs, familles monoparentale, étudiants et retraités – qui doivent chacun s’acquitter de 0,45 euros par colis.
« On ne dit plus les bénéficiaires maintenant, mais les ayants droit », tient en effet à préciser Marie, bénévole depuis quarante-deux ans et en charge du stock de l’association. Oui, des stocks, car il s’agit parfois de gérer les variations de ravitaillement en légumes et produits frais.
Marie, gérante des stocks de l’association familiale de Saint-Égrève – « Le colis correspond à 5,6 kg »
Naouelle, 29 ans, est en congé parental. Bénéficiaire depuis un an à l’association familiale, elle doit s’occuper de ses trois enfants âgés de 1, 2 et 10 ans. Cette aide, elle n’a pas de honte de la demander : « Je préfère aller demander de l’aide que voler ». Dans son sac du jour : compotes, conserves, pâtes, yaourts, fromage et légume. Cette fois-ci, un brocoli. « Je vais l’éplucher chez moi, le faire bouillir et le congeler. Vu que les légumes sont un peu défraîchis, si on les garde quatre ou cinq jours, ça va à la poubelle. »
La jeune femme se sent concernée par la lutte contre le gaspillage alimentaire. « Moi, je congèle tout, je jette très peu. Quand je fais à manger, c’est en grande quantité. On va consommer la moitié et je congèle le reste », explique cette assistante administrative.
« On se serre la ceinture mais ce n’est pas grave »
Le choix de Naouelle de ne pas travailler pour s’occuper de ses enfants est aussi financier. « Quand j’ai fait mon calcul, avec la crèche et compagnie, je ne m’en serais jamais sortie. » Elle assume donc cette situation. « Je fais grandir mes enfants et, en même temps, financièrement on se serre un peu la ceinture, mais ce n’est pas grave ». De manière inattendue, elle a pu créer des liens avec sa voisine qui vient aussi à l’association familiale. « On s’attend et on vient ensemble. » Elle se souvient par ailleurs que, quinze ans auparavant, sa mère avait, elle aussi, bénéficié de l’aide de l’association : « Les bénévoles, on les connaît depuis des années ».
Collecté ce matin dans une grande surface, le brocoli récupéré par Naouelle a effectué deux trajets en camion et un trajet en bus. Pour éviter tout gaspillage, il finira donc bouilli et congelé.
Ludovic Chataing
Bonus : Place Gre’Net vous propose un portfolio sur cette journée de redistribution alternative qui est le quotidien de nombreux bénévoles.
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