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2015 : et Grenoble devint métropole

2015 : et Grenoble devint métropole

Si l’on consi­dère ces nou­velles métro­poles – au nombre de neuf à être créées par la loi de moder­ni­sa­tion de l’action publique ter­ri­to­riale et d’affirmation des métro­poles (Maptam) du 27 jan­vier 2014 (sans comp­ter Brest et Montpellier, volon­taires pour le deve­nir, et Paris, Lyon et Aix-Marseille qui béné­fi­cient d’un sta­tut métro­po­li­tain par­ti­cu­lier –, que signi­fie ce chan­ge­ment de sta­tut pour la com­mu­nauté d’agglomération Grenoble-Alpes-Métropole (« La Métro ») au 1er jan­vier 2015 ?

Grenoble fait partie des 11 métropoles "de droit commun" © Philippe Mouche - Gre-mag.fr

Grenoble fait par­tie des 11 métro­poles « de droit com­mun » © Philippe Mouche – gre​-mag​.fr

Au-delà de ce qu’impose la loi, dès l’origine, par la recon­nais­sance de ce nou­veau sta­tut de métro­pole, ce sont les pos­si­bi­li­tés d’évolution ulté­rieures qui pré­sentent le plus d’intérêt dans un pay­sage ins­ti­tu­tion­nel pro­fon­dé­ment remis en cause par la réforme territoriale.
Doter Grenoble du sta­tut de métro­pole à part entière n’allait pas néces­sai­re­ment de soi au regard de la taille démo­gra­phique de l’agglomération. Mais l’activisme poli­tique et le dyna­misme éco­no­mique du ter­ri­toire ont eu rai­son des réti­cences du par­le­ment, Grenoble béné­fi­ciant ainsi d’une recon­nais­sance légis­la­tive, au même titre que treize autres grandes agglo­mé­ra­tions françaises.

Une nou­velle archi­tec­ture institutionnelle

Christophe Ferrari, président de la métropole grenobloise. © Joël Kermabon

Christophe Ferrari, pré­sident du conseil de la métro­pole gre­no­bloise. © Joël Kermabon

A l’instar de toutes les métro­poles, la Métro dis­pose depuis le 1er jan­vier 2015 d’un conseil de la métro­pole com­posé de conseillers métro­po­li­tains, dont le nombre et la répar­ti­tion sont fixés par la loi. En 2020, leur élec­tion devra se faire « au suf­frage uni­ver­sel direct, sui­vant des moda­li­tés par­ti­cu­lières fixées par la loi avant le 1er jan­vier 2017 », pré­cise l’article 54 de la loi Maptam, ren­voyant donc au légis­la­teur le soin de pré­ci­ser le mode de scru­tin appli­cable mais sou­li­gnant, dans le même temps, le carac­tère sin­gu­lier des élec­tions muni­ci­pales et com­mu­nau­taires de mars 2014.

Quant au pré­sident du conseil de la métro­pole, il est élu au scru­tin secret à la majo­rité abso­lue aux deux pre­miers tours de scru­tin ou à la majo­rité rela­tive au troi­sième tour. Enfin, la loi Maptam pré­voit que les métro­poles de droit com­mun puissent dési­gner au maxi­mum vingt vice-présidents.

Il est éga­le­ment ins­ti­tué, à Grenoble comme dans chaque métro­pole, une confé­rence dite « métro­po­li­taine », qui réunit au mini­mum deux fois par an le pré­sident du conseil de la métro­pole – qui pré­side d’ailleurs cette confé­rence –, et les maires des com­munes membres, en vue d’évoquer « tous sujets d’in­té­rêt métro­po­li­tain ou rela­tifs à l’har­mo­ni­sa­tion de l’ac­tion de ces col­lec­ti­vi­tés ». La réunion est orga­ni­sée à l’initiative du pré­sident du conseil de la métro­pole ou à la demande de la moi­tié des maires et se tient selon un ordre du jour déterminé.

Nombre de conseillers par commune dans la Métropole grenobloise © Philippe Mouche - Gre-mag.fr

© Philippe Mouche – gre​-mag​.fr

Enfin, tou­jours sur le plan ins­ti­tu­tion­nel, une des inno­va­tions majeures des com­mu­nau­tés d’agglomération a été reprise pour les métro­poles : le conseil de déve­lop­pe­ment. Organe consul­ta­tif com­posé de per­son­na­li­tés exté­rieures à la métro­pole, ce conseil doit repré­sen­ter les milieux éco­no­miques, sociaux, cultu­rels, édu­ca­tifs, scien­ti­fiques et asso­cia­tifs. Son rôle ne change pas et la loi n’est guère pro­lixe quant à son orga­ni­sa­tion et son fonctionnement.

Des com­pé­tences com­plé­men­taires qui bou­le­versent le pay­sage admi­nis­tra­tif local

Mais si le droit ins­ti­tu­tion­nel com­mun des métro­poles reste très tra­di­tion­nel, il en va dif­fé­rem­ment concer­nant les com­pé­tences, puisqu’on relève une exten­sion sen­sible de leurs champs d’intervention.

En ce qui concerne les com­pé­tences exer­cées en lieu et place des com­munes membres, en res­pec­tant l’ordre retenu par la loi elle-même, on note ainsi qu’en matière de déve­lop­pe­ment et d’a­mé­na­ge­ment éco­no­mique, social et cultu­rel, le champ d’intervention a été com­plété par la par­ti­ci­pa­tion au copi­lo­tage des pôles de com­pé­ti­ti­vité et au capi­tal des socié­tés d’ac­cé­lé­ra­tion du trans­fert de tech­no­lo­gie, la pro­mo­tion du tou­risme et la créa­tion d’of­fices de tou­risme, l’établissement d’un pro­gramme de sou­tien et d’aides aux éta­blis­se­ments d’en­sei­gne­ment supé­rieur et de recherche et aux pro­grammes de recherche.

© Philippe Mouche - Gre-mag.fr

© Philippe Mouche – Gre​-mag​.fr

De même, en matière d’aménagement de l’espace, la métro­pole est com­pé­tente de plein droit pour les sché­mas de cohé­rence ter­ri­to­riale et sché­mas de sec­teur, pour les plans locaux d’urbanisme, pour créer et amé­na­ger des opé­ra­tions d’aménagement d’intérêt métro­po­li­tain ou pour être auto­rité orga­ni­sa­trice de la mobi­lité (notion évi­dem­ment plus large que celle des seuls trans­ports urbains), notamment.

En ce qui concerne la com­pé­tence habi­tat, elle est éga­le­ment vaste et intègre, outre le PLH et la poli­tique du loge­ment, une inter­ven­tion de la métro­pole pour l’a­mé­na­ge­ment, l’en­tre­tien et la ges­tion des aires d’ac­cueil des gens du voyage. La poli­tique de la ville inclut, de même, une com­pé­tence en matière de dis­po­si­tifs d’ac­cès au droit. Pour la ges­tion des ser­vices d’in­té­rêt col­lec­tif, on retrouve les cime­tières et sites ciné­raires d’intérêt métro­po­li­tain, la créa­tion et la ges­tion des crématoriums.

Enfin, la com­pé­tence rela­tive à la pro­tec­tion de l’environnement est par­ti­cu­liè­re­ment étof­fée puisqu’elle couvre désor­mais de la ges­tion des déchets ména­gers à la contri­bu­tion à la tran­si­tion éner­gé­tique, l’élaboration et l’adoption du plan cli­mat-éner­gie ter­ri­to­rial (PCET), la conces­sion de la dis­tri­bu­tion publique d’élec­tri­cité et de gaz, la créa­tion, l’aménagement, l’entretien et la ges­tion des réseaux de cha­leur ou de froid urbains, la créa­tion et l’entretien des infra­struc­tures de charge néces­saires à l’u­sage des véhi­cules élec­triques ou hybrides rechar­geables, la ges­tion des milieux aqua­tiques ou encore la pré­ven­tion des inondations.

Métropole - Grenoble

© Grenoble Alpes Métropole

L’extension des com­pé­tences est donc une réa­lité, d’autant plus que, si une majo­rité qua­li­fiée de com­munes le sou­haite, une métro­pole peut bien évi­dem­ment exer­cer des com­pé­tences sup­plé­men­taires. Enfin, la métro­pole est asso­ciée à l’élaboration de dif­fé­rents sché­mas et docu­ments de pla­ni­fi­ca­tion en matière d’a­mé­na­ge­ment, de déve­lop­pe­ment éco­no­mique, et pourra donc, dans ce cadre, faire valoir son point de vue. Mais cet élar­gis­se­ment des com­pé­tences peut encore être accen­tué par une délé­ga­tion conven­tion­nelle de com­pé­tences de la part d’autres col­lec­ti­vi­tés ter­ri­to­riales ou de l’État.

Ainsi, des délé­ga­tions de com­pé­tences de la part des dépar­te­ments sont pos­sibles dans des domaines sen­si­ble­ment plus larges que ceux qui étaient pré­vus jusqu’alors. De même, des délé­ga­tions de la part de la région sont ren­dues pos­sibles par la loi en matière de lycées ou de déve­lop­pe­ment éco­no­mique. Enfin, les métro­poles de droit com­mun peuvent, à leur demande, se voir délé­guer un cer­tain nombre d’in­ter­ven­tions éta­tiques, à condi­tion de dis­po­ser d’un pro­gramme de l’ha­bi­tat exécutoire.

De plus, l’État peut trans­fé­rer à la métro­pole, qui en fait la demande la pro­priété, l’a­mé­na­ge­ment, l’en­tre­tien et la ges­tion de grands équi­pe­ments et infra­struc­tures. La loi pré­voit, pour finir, des moda­li­tés simi­laires de délé­ga­tion pour la ges­tion des loge­ments étu­diants ou la construc­tion et la ges­tion de foyers de jeunes travailleurs.

Une métro­pole gre­no­bloise ame­née à se singulariser

La volonté du légis­la­teur de prendre en compte les situa­tions locales dans toute leur com­plexité est louable : elle abou­tit néan­moins à pré­voir tant d’adaptations immé­diates ou à venir que le régime juri­dique en perd néces­sai­re­ment de sa cohé­rence et de son carac­tère com­mun. En même temps, c’est une chance offerte au ter­ri­toire gre­no­blois de faire pré­va­loir ses spé­ci­fi­ci­tés et ses avan­tages concur­ren­tiels sur les autres métro­poles françaises.

Cette absence de droit com­mun uni­forme et cette pré­oc­cu­pa­tion constante du légis­la­teur d’adapter la règle de droit aux spé­ci­fi­ci­tés des ter­ri­toires rend éga­le­ment la réforme per­ma­nente. La loi Maptam à peine pro­mul­guée, de nou­velles étapes sont déjà annon­cées, à l’instar des décla­ra­tions pré­si­den­tielles conte­nues dans la confé­rence de presse du 14 jan­vier 2014.

Dans la lignée des pro­pos de François Hollande, le gou­ver­ne­ment envi­sage en effet désor­mais de sup­pri­mer, d’ici 2020, les conseils géné­raux sur le ter­ri­toire des métro­poles dites de droit com­mun. Une telle évo­lu­tion, pour le moins auda­cieuse et déli­cate poli­ti­que­ment, s’ins­pi­re­rait donc de l’exemple lyon­nais et aurait voca­tion à être ins­crite dans le pro­chain pro­jet de loi de décentralisation.

Le conseil de la Métro Grenoble Alpes Métropole

Le conseil de la Métro, peu avant le pas­sage en métro­pole. © Grenoble Alpes Métropole

Ainsi, en ce qui concerne la métro­pole gre­no­bloise, la dis­pa­ri­tion annon­cée du Conseil géné­ral de l’Isère sur son ter­ri­toire, ainsi que la fusion déci­dée des régions Rhône-Alpes et Auvergne dès le 1er jan­vier 2016, annoncent de nou­velles confi­gu­ra­tions poli­tiques et ins­ti­tu­tion­nelles locales : chance ou risque pour la nou­velle métro­pole alpine ?

Seul l’avenir pourra appor­ter des élé­ments de réponse mais il est évident que le chan­ge­ment de sta­tut ne signe en rien la fin d’une aven­ture inter­com­mu­nale débu­tée il y a près de cin­quante ans (en 1966), sous la forme d’un syn­di­cat inter­com­mu­nal regrou­pant alors 21 com­munes. Couvrant désor­mais 49 com­munes et près de 433 000 habi­tants, la nou­velle Grenoble-Alpes Métropole va pou­voir conti­nuer à écrire sa propre his­toire et pour­suivre ses efforts de dif­fé­ren­cia­tion avec les autres métro­poles françaises.

Nicolas Kada

FB, NK et RR

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